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Par Camille Loty Malebranche

 

L’espoir est un sentiment, un état d’esprit qui tient de l’attente active de ce que l’homme peut avoir ou tenter d’appréhender à l’échelle des possibles de son activité. L’homme de l’espoir ne vise jamais qu’à ce qui est à la portée de sa démarche individuelle ou de la marche collective selon l’action projective entreprise dans la dynamique constructrice de la fin espérée. L’espoir est comme l’attente puissamment engagée de l’attaquant footballeur qui voit les failles du gardien des filets adverses et espère en profiter par l’effort et le talent dans sa volonté de marquer des buts. Notre footballeur peut ne jamais réussir le but espéré mais son attente reste néanmoins un possible à la portée du sujet agissant qu’il est. L’espoir est une finalité pratique et séculière de l’homme face aux défis qu’il se donne ou aux impondérables des situations qui l’affectent, alors que l’espérance est une attente fondée dans la certitude par la confiance en Dieu

 

L’espérance - si elle se retrouve synonyme de l'espoir dans un certain schème dénotatif et connotatif du langage ordinaire - désigne, une fois posée sur le plan théologique, l’attente transcendante de l’humain, qui, faisant face à toutes les adversités de la condition humaine, garde le cap spirituel de son entéléchie pressentie, son but perçu par l’intuition de la foi. L’on comprend alors que chez l’apôtre Paul, l’espérance soit une vertu théologale liée à la foi. L’espérance est la vertu intérieure de l’esprit sachant que le devenir suprême, la fin dernière de l’homme, est au-delà des conquêtes temporelles de l’être humain. Si nous prenons, par exemple, le christianisme, l’espérance y est la motivation de la conscience métaphysique qui porte l’homme à choisir l’orientation spirituelle de son existence. L’espérance rappelle que toute existence humaine est l’expression intérieure du rapport à soi et à Dieu et pas seulement extériorisation de soi par la pensée et l’action dans cette vie sensible, où tout semble matériel. De sorte que l’espérance, à la différence de l’espoir, est manifestation de l’essence spirituelle de l’homme qui sait que la vie intérieure de la foi et de ses principes de communion avec Dieu et de justice envers tous, est gage de la rédemption humaine en Christ. La spiritualité est donc la vie selon l’espérance qui y voit un apprêt ontologique incontournable, sans quoi nul humain ne peut évoluer vers l’éternité. Ainsi, l’éternité, la félicité et la prise de possession plénière de la vérité de l’esprit loin des misères et finitudes de la chair et du terrestre, découlent de l’espérance.

 

L’espérance n’est donc pas l’utopie qui est vacuité, c'est-à-dire  non corporéité de l’objet utopique porté par l’imaginaire, car l’utopie reste séculière et à l’échelle profane de l’homme agissant qui espère l’effacer en créant l’objet de l’utopie, laquelle, comme le rêve réalisé, s’estompe dans la réalité.

 

L’espérance est la propulsion spirituelle par la foi qui procure, au-dessus du fini, la clarté ontologique du devenir éternel de l’esprit conscient de soi et prenant la voie de son salut.

 

L’espoir est profane, temporel alors que l’espérance s’étaye dans la spiritualité et latemporalité.

 

L’avenir positif prescrit par des historicistes, est une forme de religion de l’histoire rendue principe divin pour les besoins d’une fin heureuse de l’humanité par delà le tragique existentiel individuel et collectif qui se constate dans la grisaille des jours. L’avenir historiciste n’est jamais espérance de l'homme mais utopie sociale projetée pour l’histoire collective.

 

        LES HISTORICISMES ET L'ESPÉRANCE

 

Tout historicisme, je veux dire, toute doctrine prônant un accomplissement historique de l’humanité en érigeant l’histoire comme une grande totalité, n’est en fait que théorie sacralisante de l’espoir profane transposé dans les modalités logiques de la métaphysique de l’espérance. Toutefois, seule la métaphysique spirituelle croyante peut pourvoir l’espérance du terrain supramondain, espace indispensable à son éclosion.

De Hegel à Éric Weil en passant par Marx et Ernst Bloch, la doctrine d’une fin heureuse nécessaire de l’histoire doit être comprise comme transposition de l’espoir séculier dans les formes sacrées de l’espérance. Et le concept espérance de Bloch est une métaphysique inavouée de l’utopie soi disant concrète. 

Il n’y a pas de détermination historique d’un bien qui viendra réaliser les espoirs et projections utopiques des hommes, en amenant la concrétisation de la société idéale fût-elle perçue dans l’État bourgeois, ou selon l’établissement du communisme après la révolution socialiste victorieuse que la dialectique historique imposera en y entraînant hommes et sociétés. À ce stade, l’espoir et l’espérance sont inconciliables, et l’histoire demeure et demeurera fatalement le lieu de l’inéluctable inachèvement, du feu dévorant de l’inaccomplissement de tout ce qui est historique. Il est certain, par contre, que de bonnes doctrines appliquées peuvent améliorer de beaucoup, le sort social des hommes, sort qui n’est aussi déplorable qu’on le constate, que parce que quelques-uns l’ont ainsi choisi, voulu, planifié et maintenu par des doctrines politiques et économiques, des conceptions sociales délétères, violentes et inhumaines.

           

ESCHATOLOGIE ET TRANSESCHATOLOGIE

 

À l’échelle individuelle, l’espoir est une téléologie simplement rêvante et agissante vers son but. Au niveau collectif, l’espoir est prospectif voire futurologique, inscrit dans la perception du déploiement du temps de l’évolution sociale, visant  à l’aboutissement de son objet dans le devenir historique d’une société donnée. L’espoir tient donc de l’eschaton, inapte qu’il est, à abstraire le schème de la temporalité dont il relève.

 

L’espérance est supratemporelle et essentiellement transeschatologique, car pour l’esprit en espérance, il n’y a pas de fin dernière ici-bas, il n’y a que le voyage entéléchique à travers les étapes terrestre vers le céleste selon la Volonté Divine dans la nécessaire collaboration de l’homme de foi embrassant sa destinée spirituelle à accomplir.

 

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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Tag(s) : #Monde du Concept
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