Par Camille Loty Malebranche
À la différence de la foi suggestive ne tenant que de l’exercice de la concentration et de l’autosuggestion mentales, la foi spirituelle tient de la double racine de l’intuition et de la révélation sans quoi, elle ne peut être. D’abord l’intuition comme sentiment et expérience intérieurs de la nature véritable de l’homme, que suit l’appel divin subséquent, lequel complète cette intuition du soi et constitue la révélation intérieure. Naturellement, il y a la révélation extérieure, par notre rapport aux justes dogmes de l’Écriture vraiment sacrée, qu’il faille toujours bien discerner, sans se laisser avoir par des suggestions de morales humaines, impériales, combien oiseuses que l’on nous dit saintes.
Un livre totalement sacré, en fait, n’existe pas, sauf pour les manipulateurs. Il y a par contre, des révélations sacrées divines dans des livres qui ont autant de paroles divines qu’humaines. Là, dans le rapport aux écritures, la foi ne doit point être aveugle. Il y a, bien sûr, la théophanie indirecte qu’est l’univers, la Création. Cela fonctionne comme modalité du croire dans la perception extérieure pour qui a reçu le don de l’intuition mystique... Mais la perception extérieure de la déité si elle n’est pas enracinée dans l’intuition et l’intimité, ne peut être que vague sans puissance spirituelle, d’où ses dérivations en rites et formes sans spiritualité véritable des pratiquants de toutes sortes à travers les âges et les cultures.
Un autre socle de la foi, c’est l’intervention de Dieu dans la vie du croyant en des circonstances où le secours divin fait toute la différence d’avec ce qu’il en est pour le non croyant. Mais il reste que celui qui n’a pas le sentiment intérieur de la transcendance, de la vérité supérieure de l’étant qu’il est et de l’Être Infini dont il procède; qui ne sent nulle ascension au-delà du monde quand il regarde la matière; qui n’éprouve aucune sensation d’appel et de destinée personnelle supérieure par-delà le destin immédiat de l’absurde apparent du tangible - car il est une destinée de gloire de l'espèce que chaque humain vraiment éveillé éprouve, et doit vivre et assumer - ne peut vraiment croire de manière vivante, active et actuelle au point d'être en cohabitation-communion avec Dieu. Ce sont des esprits absents, insensibles à eux-mêmes. On a beau dire et étayer de thèses et d'images pour communiquer la foi, aucun message ne peut attirer un homme à Dieu si son intuition métaphysique est muette en lui-même. La foi est, comme nous l'avons ailleurs signifié, un "mitsein" humano-divin, c'est à dire un vivre ensemble de l'esprit qu'est l'homme avec Dieu. Mitsein qui ne se peut que par une préalable ascension intérieure de l'esprit éveillé vers le vrai soi. Encore une fois, "le connais-toi, toi-même" est la voie royale et mystique de la foi.
La foi est un envol de contemplation, d’adoration de tressaillement devant le Créateur Instigateur de l’Être comme existence infinie et comme infinité d’étants finis. C’est aussi l’ovation littéralement apothéotique de la vie qui reconnaît à la fois, la volonté, l’initiative et la réalisation démiurgique de Dieu en le soi vivant insolite qu’est l’Homme.
L’homme de la foi est un chantre exalté qui psalmodie au Dieu Créateur et Père. C’est le poète de l’amour originel qui fait sentir la vérité au-dessus des mensonges du fini, contre les haines et déchéances du monde; c’est le proclamateur de la vie qui excède l’existence, se sachant esprit qui transcende le fini de la chair en sa conscience aimante qui appréhende Dieu en ses tréfonds. C’est pourquoi, la foi est harmonie du soi et fusion avec l’Esprit originaire qu’est Dieu. Lieu de révélation dogmatique pérenne et de révélations personnelles ponctuelles, la foi est gage permanent de victoire en toutes circonstances, c’est la puissance de la vie qui annihile les forces de mort. C’est là, le sens christique du nouvel homme ressuscité sur les ruines du vieil homme, oripeau asservi du désespoir, défroque usée par la déréliction impie. Le soi humain conscient spirituel, éveillé à soi et au Soi divin des origines premières et des fins dernières (car généalogie et eschatologie fondamentales ne sont possibles qu’à l’échelle de Dieu), sait que sa foi est pour lui, la mort de la mort.
L’homme ne peut être vraiment conscient de soi, s’expérimenter intérieurement esprit et sujet pétri de sensation d’éternité par delà la chair et le sang, sans reconnaître et vivre intensément son enracinement de fait dans l’Être Éternel dont il relève! Un Être Éternel prêt à tous les miracles protecteurs et salvifiques en faveur des siens.
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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