Par Guy Delorme avec Cécilia & Marcel, le 22 septembre 2012
-Alep :
Le correspondant de l’AFP à Alep a entendu de « puissants tirs d’artillerie » tôt ce matin. Et comme en écho, l’OSDH égrène les noms des quartiers concernés par le pilonnage : Chaar, Sakhour, Hanano et Katergi (est), Arqoub (zone industrielle à l’est de la ville), Marjé (sud). Des localités de la région nord d’Alep tenues par les insurgés comme al-Bab (une trentaine de kilomètres au nord-est d’Alep) ont fait également l’objet de pilonnage vendredi selon l’OSDH.
Sana évoque elle la « purification » d’un complexe industriel à Souleyman al-Halibi, ds combats àal-Chaar
Selon des sources pro-gouvernementales, 53 membres de la branche syrienne d’Al-Qaïda, le « Front Jabhat-Nusrat« , dont de nombreux étrangers, ont été tués mercredi dans un raid aérien contre l’école al-Fida al-Arabi où ils s’étaient retranchés, dans le quartier Kallassé à Alep.
Selon Arab Press, le quartier avoisinant Maysaloun était jeudi le théâtre de violents combats au cours desquels 35 miliciens ont été abattus. Toujours à Alep, deux membres de
l’ASL ont été tués dans une attaque aérienne contre leur voiture dans le quartier Sukkar (ou Sukari, sud-ouest). L’un des deux tués est le cheikh intégriste Majed Said.
Par ailleurs, le site Syria Truth a fait état de la mort du docteur Tarek Raja Nasser lundi, durant des accrochages au nord d’Alep. Fils aîné du secrétaire adjoint du Comité de
coordination national – groupe d’opposition -, le juge Raja Nasser, il militait dans les rangs de Jabhat Nusrat. Syria Truth assure que Tarek travaillait depuis six ans avec la
filiale d’Al-Qaïda en Irak.
Toujours dans la région d’Alep, vers al-Attareb (ou Antareb, à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de la ville), Sana annonce la destruction de pas moins de 40 véhicules de la rébellion, vendredi soir ou samedi matin : il est au moins à peu près certain qu’une colonne motorisée assez importante de l’ASL, opérant ente Idleb et Alep, a été décimée.L’OSDH évoque aussi des combats dans cette région ouest, à Orm et Kafar Joum à moins de dix kilomètres à l’est d’al-Attareb. L’OSDH affirme que 11 soldats ont été tués ce samedi matin dans ces combats, qui interviennent à la limite des gouvernorats d’Idleb et d’Alep, et l’on voit que la rébellion aimerait bien relier les zones qu’elle contrôle à l’est d’Idleb avec les abords ouest de la capitale économique syrienne, mais bien évidemment l’armée a compris la manoeuvre et ne va pas la faciliter…
Voilà qui nous ramène à la récurrente question des pertes rebelles à Alep : Voici un mois, un général syrien en charge d’une partie des opérations les estimait à 2 000 tués sur un total de 7 000 combattants. Aujourd’hui des sources gouvernementales avancent le chiffre de 4 000, dont 2000 durant les trois premières semaines, sans qu’on sache si ce chiffre comprend les blessés et les capturés. Mais la bataille d’Alep dure depuis un peu plus de deux mois, avec des affrontements quotidiens de grande intensité touchant une bonne dizaine de quartiers. Sana et les médias officiels parlent presque tous les jours de dizaines de rebelles tués, à Alep et dans la région entre la ville et la frontière turque. N’y aurait-il que cinquante tués par jour – cela nous semble un minimum vu les récits que nos lisons, tant du côté gouvernemental que de celui de l‘AFP et de l’opposition – cela représenterait pour deux mois d’affrontements un chiffre – plancher – de 3 000 tués, avec certainement deux fois plus de blessés. Ajoutons un nombre indéterminé – mais sans doute peu élevé compte tenu du fanatisme de nombre de rebelles – de prisonniers, et l’on est pas loin des 10 000 pertes totales depuis le début de la bataille en juillet. Nous estimions à 10 000 le nombre des insurgés à Alep et dans le nord de la province. Sans doute étaient-ils plus nombreux. 15 000 ?
Des sources médiatiques syriennes ont constaté que les sources des rebelles restent très discrètes sur le nombre des victimes des miliciens, aussi bien les étrangers que les Syriens. A Alep seulement, il s’élèverait à plus de 4000 depuis le début de l’éclatement de la bataille :
Et histoire de donner un peu plus de réalité à ces compte-rendus et statistiques voici une vidéo de l’armée arabe syrienne en action à Alep (secteur de Maysaloun) vendredi, 21 sept. 2012 : on y voit notamment les habitants applaudir les combattants de l’armée arabe syrienne (durée: 16 min. environ) :
-Damas :
Dans la province de Damas, et en particulier dans la région de Qadam (périphérie sud de la ville), un charnier comportant 25 cadavres a été découvert ce vendredi. Les victimes avaient les yeux bandés et les mains ligotées derrière leur dos. Sana estime pour sa part qu’ils ont été tués par des miliciens délogés de cette région située au sud de la capitale par les forces régulières.
À Douma, ville située à une quinzaine de kilomètres au nord est de Damas, et théâtre depuis le début de l’année de fréquentes incursions rebelles, plusieurs activistes ont été tués dans le bombardement d’une de leur concentration. Les noms et les photographies de six d’entre eux ont été publiés sur Facebook.Une source de l’opposition évoque aussi des combats à Harasta (deux kilomètres à l’ouest de Douma), dans lesquels au moins un déserteur a été tué.
Selon Arab Press, leurs véhicules ont également été détruits. Pour sa part, la télévision pan-arabe al-Mayadeene a confirme, après une source insurgée, que les rebelles ont opéré un retrait tactique de Damas après cinq jours de combats intensifs.
-Homs :
Dans le gouvernorat de Homs, les Comités de coordination de la révolution, instance qui relaie les informations de l’insurrection auprès notamment de l’OSDH, et organise les manifestations de rue anti-gouvernement, ont publié jeudi sur leur site les noms de 22 membres de l’ASL et de huit civils qui auraient été tués dans plusieurs secteurs de la province durant des accrochages avec les forces gouvernementales. Mercredi, le site (pro-gouvernement) Shukumaku a fait état de plus de 70 tués dans les rangs des miliciens ces dernières 48 heures dans le seul quartier de Bab Houd, (centre ville, au nord de la citadelle) apparemment devenu le principal lieu d’affrontement à Homs.
Le site signale aussi que les forces gouvernementales ont détruit un QG des miliciens dans le même quartier, provoquant un incendie en raison des quantités de pétrole qu’il contenait.
Ce vendredi, l’agence Sana a fait état d’une riposte de l’armée à une attaque dans le quartier Der Baalabat (ou Dayr Ba’albah, limite nord-est d’Homs), tuant et blessant un nombre indéterminé de miliciens et en capturant d’autres. Alors que Syrian Documents a relayé l’annonce par les Comités locaux de coordination (CLC) de Homs de la mort de deux miliciens – huit autres étant blessés – dans un pilonnage contre la localité de Houla, située à une vingtaine de kilomètres au nord-ouest de Homs, et tragiquement médiatisée en mai dernier par un massacre de civils faussement attribué à l’armée.
-Idleb :
Une attaque d’une bande contre un point de contrôle établi au village de Martin a été repoussé, le commando, poursuivi, laissant des hommes sur le terrain ; un soldat a été tué dans l’incident.
-Frontière Nord Liban :
Un groupe a été poursuivi et décimé samedi à l’aube dans la vallée d’al-Bqeiha, près de la ville de Talkalakh, ville située sur la frontière du nord-Liban et objectif d’incessantes tentatives d’infiltrations de la part des rebelles basés sur le territoire libanais. Non loin de là, à al-Dossarieh, un pick-up à mitrailleuse a été détruit. Et dans la nuit de vendredi à samedi, une énième tentative d’entrée en Syrie a été repoussée avec pertes près du village libanais d’al-Khalissah (une dizaine de kilomètres au sud-est de Talkalakh).
-Deraa :
À Deraa, les insurgés ont enlevé jeudi le directeur du legs islamique du gouvernorat, Moammar Chahadate. Ce dernier avait fait l’objet de menaces pour ses prises position publiques en faveur du gouvernement.
Les brigades al-Moatassem Bi-llah ont annoncé la mort d’un de leurs chef Adham Abboud dans des accrochages avec l’armée jeudi.
-Raqqah :
Dans la région de d’ar-Raqqah (ou Rakka, au nord-est de la Syrie), les sources des insurgés ont annoncé la mort d’un chef milicien et ancien capitaine de l’armée régulière ayant fait défection, Amine al-Bawwab, dans des accrochages avec l’armée. Dans cette région, 54 personnes, selon un dernier bilan OSDH ont été tuées dans l’explosion d’une station d’essence dans un bombardement de l’armée régulière. Comme nous l’avons rappelé vendredi, un grand nombre de ces « personnes » sont des insurgés venus apparemment se ravitailler en carburant et surpris sur le parking de la station par une frappe aérienne.
Swiss (and jordanian) connection
En marge de cet aspect strictement « militaire » de la crise syrienne, le gouvernement et les médias suisses s’interrogent beaucoup depuis 48 quelques semaines sur la présence de grenades made in Switzerland dans les mains des rebelles syriens. À l’origine de l’affaire, une simple photo montrant un de ces combattant brandissant un modèle helvète de grenade à main parfaitement identifiable. Or, les autorités suisses n’ont vendu ce type d’armes, au Proche-Orient, qu’aux seuls Émirats arabes unis, voici plusieurs années.
La photo a été connue en juillet. Sans perdre de temps, Berne – neutralisme oblige ? – a décidé la création d’une commission d’enquête mixte avec, et aussi un embargo temporaire sur les livraisons d’armes aux E.U.A., d’ailleurs levé sitôt la commission installée. Celle-ci a fini par établir que les Émirats avaient « cédé » en 2004 une partie de leur stock de grenades suisses au gouvernement jordanien, qui devait les utiliser contre des « terroristes » locaux. Comme le dit aujourd’hui le gouvernement suisse, « de là, les grenades ont à l’évidence cheminé jusqu’à la Syrie ». Le communiqué ne dit pas dans quelles circonstances, mais il insiste sur le fait que la vente de ce matériel à la Jordanie a précédé la promulgation de 2006 d’une loi interdisant à un pays acheteur d’armes suisse de les ré-exporter vers un autre pays. Du coup, Berne pense à une clause que signeraient dorénavant les E.U.A. et qui les engagerait à ne pas revendre – ou donner « à titre gracieux » – des armes suisses à un pays tiers. En tous cas, il se confirme que le Qatar et l’Arabie séoudite n’ont le monopole de la contrebande d’armes vers la rébellion : tous leurs « associés » du Conseil de coopération du Golfe – on a vu un représentant du Koweit récemment visiter les rebelles à Idleb – sont impliqués ans la même guerre non déclarée à la Syrie.
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