Par Guy Delorme avec Cécilia, le 29 septembre 2012
Tous semblent s’accorder sur le fait que les combats ont été particulièrement violents vendredi à Alep, les rebelles ayant lancé une série d’attaques contre les positions de l’armée, qui a dit les avoir toutes repoussées. Les rebelles en conviennent d’ailleurs : un chef de la brigade Tawhid a dit que ses troupes avaient conquis une « base » de l’armée dans le quartier de Salaheddine mais qu’ils n’avaient pu s’y maintenir. D’autres chefs rebelles ont dit avoir progressé dans les quartiers de Sukhari (sud-ouest, et au sud-est de Salaheddine) et Izaa (nord).
Mais on commence à savoir ce que valent les communiqués de victoire de la rébellion : les éventuelles avancées de celle-ci dans tel ou tel quartier concernent deux ou trois rues. La réalité c’est que l’ASL et les groupes islamistes associés ont mené jeudi soir et vendredi des attaques tous azimuts pour exorciser une défaite inéluctable.
De cette stratégie du désespoir témoigne l’incendie des commerces de la Vieille ville, tôt ce samedi matin : des centaines de boutiques seraient la proie des flammes ; cette stratégie de la « ville brûlée », déjà utilisée par les Communards de Paris en 1871, a une double motivation : freiner l’avance de l’armée, et punir une ville qui s’est refusée à la « Révolution ».
Une source militaire a publié ce samedi matin une liste nominative de 75 rebelles tués vendredi à Alep ; sur cette liste ne figurent pas un certain nombre de morts non encore identifiés. L’ASL agonisante ne regarde pas à la dépense humaine, facilitée par la sombre détermination islamiste à mourir pour la cause de Dieu et du Califat.
Voici quelques éléments sur ce qui s’est passé vendredi à Alep, lors de la soi disant « offensive décisive » menée par l’ASL pour la conquête de la ville :
-Dans la Vieille ville, notamment près de la place al-Meleh et d’une école de médecine, plusieurs rebelles ont été tués.
-A Bab Antakya (centre), un groupe a été décimé.
-A Cheikh Maqsoud, quartier à dominante kurde et chrétienne tout au nord de la ville, un groupe a été décimé. Le quartier accueille plusieurs milliers de réfugiés ayant fui les combats et l’ASL. Une source pro-gouvernementale indique que 16 terroristes du Front al Nusra (al-Qaïda) ont été tués par l’armée le vendredi 29 septembre dans ce quartier, après qu’une quarantaine d’entre eux ont tenté de s’infiltrer. Voici en tous cas le photos de plusieurs cadavres ASL, prises à Cheikh Maqsoud :
http://www.facebook.com/media/set/?set=a.415912811796112.106118.315633288490732
-A Boustane al-Bacha (nord), près d’un institut agricole, un ou deux groupes armés ont été intégralement détruits.
-A Boustane al-Kasr (ouest de la Vieille ville), des activistes mis hors de combat près de l’école de l’Indépendance.
-A Salihine (sud de la ville, à l’est de Fardos), accrochages près de la mosquée Omar ben Abdel Aziz.
-A Al-Kalllase (centre-sud, et au nord de Fardos) accrochage près de la mosquée Jamal Abdel Nasser ; Sana parle selon son habitude de « dizaines de terroristes » tués et blessés, évaluation peut-être « embellie » mais renvoyant néanmoins à une réalité meurtrière.
-A Bab al-Nairab (est de la Vieille ville), une bande décimée près de l’usine à glace.
-Autre accrochage à Souk al-Khodra.
-Au rond point d’Aghiour, près de la citadelle et de la Vieille ville, accrochage encore.
-Au pond point de Bab al-Hadid (est de la Vieille ville), une bande décimée.
-A Tall al-Taraziz, un quartier périphérique, une autre bande a été décimée, et cette fois Sana fournit un bilan précis : 22 activistes tués, et d’autres blessés, ainsi que deux pick-up à mitrailleuse lourde détruits.
Dans la région d’Alep, six pick-up et deux camions transportant des armes ont été détruits sur la route Mareh/Akhtarin, non loin de la frontière turque. A Al-Bab, ville située à une trentaine de kilomètre au nord-est d’Alep et tenue par la rébellion, l’armée a frappé (par air ?) un rassemblement d’insurgés : Sana affirme que plusieurs chefs ont été tués dans cette attaque.
A l’ouest d’Alep, à Orm al-Soughra, un point d’appui ASL a été liquidé.
Samedi matin…
Selon un correspondant de l’AFP, les combats avaient toutefois baissé d’intensité vendredi soir dans la ville même, mais ce matin les chaines d’info continue française reparlaient de violents combats (« sans précédents« , hum !), entretenant vaille que vaille la fiction d’une « offensive générale » de l’ASL. On (l’OSDH, évidemment) reparle de Salaheddine, objet apparemment d’une attaque rebelle ce samedi matin.
Un habitant d’Alep contacté tôt ce samedi par une de nos habituées dit que le quartier d’Azizié (centre) et les quartiers avoisinants sont calmes ; à noter que selon une déjà vieille habitude, les rebelles ont incendié force pneus dans le centre-ville pour faire croire à des incendies ; le correspondant dit encore que le quartier de Hanano, dans l’est de la ville, serait complètement nettoyé ainsi que Soulaymanieh (centre) ; Jdeidé (à l’ouest de la Vieille ville) le serait presque.
Couvent incendié, chrétiens abattus
La nature islamiste de ces bandes ne fait que s’exacerber dans l’adversité : le couvent franciscain Saint-Antoine de Padoue, situé dans Ghanassié (Alep) a été attaqué et incendié par une bande dans la nuit de jeudi à vendredi. Et 15 chrétiens du quartier de Soulaymanieh (centre d’Alep, au sud de Boustan al-Bacha) auraient été enlevés puis abattus jeudi par les activistes selon une source du quartier. Et toute cette journée du jeudi 27 septembre, les ASL ont pilonné au mortier les quartiers plutôt chrétiens de Souleymanieh, Azizieh (sud de Souleymanieh), et aussi Midane (est de Souleymanieh), qui les ont repoussés où dont ils ont été chassés les semaines précédentes. Mais ce débordement de violences à visée communautaire témoigne aussi de l’impuissance et de l’échec de bandes qui ne peuvent plus, de l’aveu de certains de leurs responsables, que défendre les positions qui leur restent.
A présent un reportage de la télévision syrienne montrant le gouverneur d’Alep en train de faire la tournée de plusieurs quartiers sous contrôle, notamment la place Saadallah al-Jabri – centre ville – qu’al-Jazzera décrivait comme menacée par une « offensive » de l’ASL. Le gouverneur s’entretient avec les habitants qui témoignent leur satisfaction du retour de l’ordre. Des images indéniablement propagandistes, mais qui ont le mérite d’infirmer par l’image les communiqués victorieux de rebelles et la désinformation deS médias du Golfe :
http://www.youtube.com/watch?v=ZTYqhf4H774&feature=youtu.be
Toujours au chapitre « Après la bataille », voici un reportage de la télévision syrienne al-Ikhbarya montrant les dégâts subis par les quartiers de Souleymane al-Halabi (nord-est, première partie de la vidéo) et de Souleymanieh (centre, deuxième partie de la vidéo), nettoyés des rebelles mais à l’évidence meurtris par les combats. Des habitants témoignent de la violence des activistes qui les ont notamment séquestrés dans leurs appartements pendant plusieurs jours ; à la fin du reportage, une femme de Souleymanieh tire une morale de tout cela : « Chrétiens et musulmans nous resterons ici, jamais les terroristes ne réussiront à nous faire partir de chez nous ! »
http://www.youtube.com/watch?v=5YFIG2E98RI&list=UUuD15-hA3hh_qX7YqwHrgag&index=7&feature=plcp
-Damas :
Deux civils qui avaient enlevés la semaine par des rebelles à al-Qaboun (nord de Damas) viennent d’être libérés par une opération militaire contre un local des insurgés de ce quartier, opération qui a mis plusieurs activistes hors de combat.
A Sidi Meqdad, dans la banlieue sud de Damas, des insurgés ont tiré à la roquette RPG sur deux mosquées, ne causant que des dégâts matériels ; les soldats ont abattu un des assaillants.
L’OSDH entretient la flammèche de l’ASL à Damas en évoquant des « affrontements » dans les quartiers de Barze (nord-est) et de Tadamone (sud), ainsi que des « bombardements » dans des localités périphériques comme Douma (nord-est), Zainab (sud-est) et Mouadamiyet al-Cham (sud). L’OSDH ment d’abord par exagération, suggérant avec de tels communiqués que l’ensemble de ces localités est soumis à un feu dévastateur ou à des combats acharnés : la réalité est souvent plus modeste, en étendue comme en durée, et quelques échanges de tirs ou la chute d’un obus de mortier ne veut pas dire que la guerre est revenue dans ces villes, faubourgs et villages.
Et puis, la télévision syrienne a démenti la nouvelle d’un deuxième attentat au QG de l’armée, propagée vendredi par des rebelles et surtout al-Jazeera qui de « pan arabe » est vraiment redevenue qatari à l’occasion de la crise syrienne.
-Idleb :
Deux pick-up-mitrailleuse ont été détruits sur la route Idleb/Ma’arat al-Numan. Trois autres véhicules rebelles ont subi le même sort au sud de Sermine (ville située près d’Idleb).
-Homs :
Un nouvel accrochage dans le quartier de Bab Oud (centre ville) a décimé une bande ; Sana fait allusion à d’autres accrochages dans la ville.
A Talbisseh, à dix kilomètres au nord de Homs, plusieurs rebelles ont été tués.
-Hama :
A Souran (kilomètres de Hama), un groupe a été décimé et son chef, Ali Mahmoud Abdel Latif, a été tué. A Aqareb près de Salamiah (à une trentaine de kilomètres au sud-est de Hama), deux activistes ont été tués, trois blessé et quatre capturés dans une opération qui a permis en outre la saisie d’une voiture bourrée d’armes et de munitions. Toujours dans le gouvernorat, au village de Qasstoun près de la ville d’al-Ghab (à peu près à mi-chemin de Hama et de Lattaquié), plusieurs pick-up ont été détruits ainsi que leurs équipages.
-Deraa :
Le mufti des villes de Deraa et de Soueida a été enlevé vendredi soir à son domicile de Deraa par un groupe rebelle : Cheikh Abazeid a été conduit en voiture par ses ravisseurs en Jordanie ; le but de cette manoeuvre serait de faire croire à sa défection. A suivre et à vérifier.
Des sources insurgées affirment que six soldats ont été tués dans la région d’al-Bosra, à une quarantaine de kilomètres à l’est de Deraa.
-Frontière Nord-Liban :
Encore des tentatives d’infiltration depuis le territoire libanais mises en échec, dans la nuit de vendredi à samedi, par les gardes-frontière syriens, à Halat, Adlin et al-Amouta, villages situés au sud de la ville de Talkalakh. Et donc encore des pertes pour ces bandes, apparemment point découragées par une longue et coûteuse série d’échecs dans ce secteur.
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