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Par Camille Loty Malebranche

 

L’image de la course est le symbole le plus achevé de la praxis-action qu’est la vie de l’esprit assumé. Car l’homme, homo viator, court en quelque sorte vers le but qu’il perçoit existentiel et sa course est action à travers la praxis que constituent les pratiques situationnelles que déterminent ses assumations et ses choix.

 

L’homme agissant est, selon les occurrences, soit sujet en condition de fonctionnement, essentiellement exécutant, agent pratique, appliquant une praxis; soit sujet souverain fondateur de situation ou orienteur de situations, protagoniste d’action, praxéologue c'est-à-dire pensant son action qu’il peut, malgré une structure englobante, choisir et mener sous certaines conditions. Le penseur-acteur qu’est l’Homme, doit, pour être en accord avec ses prétentions à la dignité de conscience libre choisissante, transcender mentalement et idéellement pour conditionner même les situations où il est en condition de fonctionnement, simple agent pratique d’une structure, en lieux d’expression du sujet intégré non assimilé qu’il est censé être.

 

La praxis est démarche inscrite dans une fonction, une régularité institutionnelle. C’est le faire programmé en circonstance utilitaire. Elle est le lieu de relativisation structurelle du sujet. Tout ce que l’homme fait en interaction pour organiser ou produire des résultats au niveau d’une structure dirigée où il doit obéir à des supérieurs hiérarchiques et se faire accepter des pairs, n’est pas proprement de l’action, parce que non souveraine, mais pratique vers un résultat commandé. La praxis est surtout de l’ordre professionnel en regard à l’insertion sociale, au positionnement social; c’est le domaine du sujet relatif dans le cadre relationnel où il n’est pas maître de son action et des gestes qui y sont inhérents sans être vraiment des actes. Car un acte est une spontanéité s’exerçant avec ou sans circonstance particulière pour produire un effet qui n’est pas forcément un résultat, une visée productive utile ou économique. Souvent aliénante, la praxis peut toutefois, être gratifiante si elle laisse à l’homme assez de marge intervenante pour être transcendée. Auquel cas, il faut que la praxis ne soit pas réduite au besoin de subsistance de l’homme, à l’obligation envers une matrice institutionnelle mais qu’elle s’insère, malgré ses contraintes internes, dans le cheminement non contraignant des desiderata libres de l’homme mettant en œuvre son talent.

 

Si l’homme peut primer dans la structure où il pratique, et si, en définitive, il peut faire de la structure de praxis, un vecteur d’affirmation de ses valeurs, de son humanité à travers la projection lucide de soi, la structure est donc accommodante et la praxis devient action. Faire de la structure intégrée, un moyen qui sert ses buts sans jamais l’asservir, est une voie habile de l’agissant libre pour transformer la praxis en action. Cela est possible parfois dans le cas de certaines professions libérales où le sujet est employé mais avec la pleine liberté de sa praxéologie, sa vision réflexive et souveraine. Force est de constater que les structures accommodantes où l’on peut faire de la praxis une action, constituent un fait très marginal. Car la praxis structurelle pragmatique des institutions, ne laisse pas de place à la subjectalité praxéologique, ni à la subjectivité qui s’intègre, elle ne connaît que la sujétion de l’individu objectivé qu’elle assimile.

 

La liberté est, entre autres, la latitude de poser des actes sans utilité. L’action, supposée être la manifestation de la liberté, se reconnaît quand la démarche d’un homme agissant, surclasse toute utilité, tout utilitarisme, en tant qu’elle est le lieu de souveraineté où tout est choix et donc acte de la volonté signifiant la liberté du sujet. C’est le champ du sujet libre. Mais attention, le non utilitaire n’est ni vain ni vide car il a une finalité. Par ailleurs, la conscience volontaire et libre qu’est l’homme, ne veut pas dire aptitude et clarté à exprimer cette volonté et cette liberté effective qui en découlerait. Et, malheureusement, de fait, la plupart des hommes dans la société d’automation en cours dans le monde, agissent par procuration, en dépendance servile vis-à-vis des influences systémiques, n’osant même plus interroger leur action, dissuadés de penser et d’agir par et pour eux-mêmes. Cela, quoique planifié et standardisé systémiquement par l’institution sociale et sévissant par l’agression systématique des structures effaceuses de l’humain, l’abandon du devoir de penser par soi-même, n’en demeure pas moins défaut contingent des individus désertant jusqu’aux réflexes de spontanéité et d’éveil interrogateur propre à la nature humaine.

 

L’initiative, la proactivité, la réaction transformatrice ou adaptée non dictée, non programmée, sont des modes de mise en acte du sujet absolu, des espaces essentiels de l’homme, sujet sans détermination extérieure à soi et centre de son acte dont il est l’utilisateur, le dispensateur de sens depuis le départ jusqu’au but final.

 

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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Tag(s) : #Monde du Concept
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