Philosopher, c'est d'abord être à même d'objectiver le concret et l'abstrait par la Pensée.

Par Camille Loty Malebranche

Philosopher, c'est penser abstraitement le réel, le possible et les probables de l'utopie et du rêve. Or Penser ne se prescrit ni ne s'étudie nulle autre part qu'au fond de soi pour le penseur théoricien ou doctrinaire! Et donc, toutes les lectures et la maîtrise du langage ne confèreront jamais l'art de penser à celui qui ne l'a guère en soi.

La philosophie implique l'esprit de l'interrogation singulière et la capacité d'abstraction. C'est pourquoi, il est dit que l'on n'enseigne jamais à proprement parler, la philosophie. Toutefois, il s'agit pour le professeur d'initier ses étudiants à l'acte de philosopher par le questionnement nouveau de leur environnement immédiat et par l'exemple des philosophes anciens et contemporains. Cette dernière occurrence se fera selon les différents champs abordés dans les œuvres, afin d'inciter le néophyte à l'interrogation abstraite des problèmes classiques et nouveaux de l'homme et du monde.

Sur la philosophie à l'école, je la dis nécessaire  dans le curriculum suivi, parce que le cours de philosophie peut quand même aider à mieux outiller l'élève pour sa propre compréhension élaborée des êtres, faits, situations et choses. Ensuite, même si, en aucun cas, on ne peut véritablement apprendre à quelqu'un à philosopher, l'expérience des philosophes et de leur philosophie, l'exposition à leur discours, rendra l'élève moins désemparé face aux prêts-à-penser sévissant dans la société. Pour le reste, force est de constater que le philosophe est une espèce bien plus rare que l'on pourrait le croire, car philosopher valablement, c'est entreprendre une démarche éminemment intimiste et autonome. C'est aussi une aptitude que l'on se reconnaît par soi-même, avant de la rendre opérationnelle et expressive par l'acquisition du langage en tant que la philosophie est une discipline autant intuitive que discursive et donc fortement langagière dans son élaboration inférentielle. Quant à la recherche textuelle et la lecture, elle confère une culture philosophique mais onques ne saurait créer l'esprit philosophique. 

Le grand problème de l'incitation à penser, précédemment évoquée, est la capacité d'abstraction de l'apprenant dans un environnement où tout est si concret, si matériel et apparemment immédiat. Il faut en quelque sorte, avoir l'esprit de l'idéel, l'Esprit Philosophique, c'est-à-dire refuser les pièges de la facilité de l'immédiateté et pouvoir parcourir les étapes médiates de la pensée; ce que j'appelle, les trois schèmes de l'acte souverain de PENSER: la Méditation, la Réflexion, la Cognition. 

Méditer, c'est, éprouver de l'émoi intellectuel, en entrant en contact avec un sujet insolite qu'on explore et qu'on tente de cerner dans ses contours, ses aspects et son intériorité.

Réfléchir, c'est littéralement pour l'esprit pensant se replier stratégiquement sur soi dans une cogitation intense  comme pour métaboliser intellectuellement ce sur quoi il a médité et continue de méditer.

Connaître, c'est enfin se faire une idée assez détaillée, précise et descriptive pour définir son sujet de méditation et de réflexion. C'est pour cela que l'Idée est considérée comme fin (au sens de but) de l'acte de Penser.

Philosopher est donc un acte révolutionnaire, en tant que le philosophe pose toujours son sujet comme nouveau, inconnu et à explorer contre toute idée reçue, même si dans son évolution réflexive, il se peut qu'il se remette d'accord avec certains de ses prédécesseurs, lorsqu'il se sera lui-même fait ses propres idées dudit sujet passé au crible de son interrogation.

Enfin Philosopher rejoint les trois moments fondateurs et souverains de l'entendement connaissant, de l'Esprit en train de connaître: l'invention, la découverte, la création. Cela, j'y reviendrai peut-être un jour.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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Comments

[Eric]

Bonjour,
Et merci d'excuser mon parler un peu direct, je ne veux mettre en cause ici ni le contenu, que j'approuve, ni l'intention que je respecte sincèrement.
J'apprécie particulièrement toute tentative de promotion des principes humanistes, mais je ne suis pas certain que ce texte soit à même de déchaîner les passions ou d'en révéler de nouvelles ...
L'humanisme n'a, à mon sens, rien de si abstrait, et n'est peut-être pas à confier aux seuls intellectuels au risque, comme ici, je le crains, de faire fuir, par un langage trop élitiste, les humanistes "de base" qui souffrent aujourd'hui d'une grande solitude morale, face aux pertes de repères de nos sociétés en déclin.
Je rève pour ma part d'un langage simple et sans fioriture plus apte à convaincre chacun d'une évidence : l'humanisme se pratique chaque jour si l'on est humain, et à défaut d'en connaitre et d'en théoriser les ressorts philosophiques, la foi (où la conviction) devrait suffire à beaucoup d'entre nous pour en mettre les principes en pratique.
Reste avant toute chose à définir ensemble ces principes, cela pourrait être fait avec le plus de simplicité possible de façon à en rendre lisible l'évidence, par un aspect un peu plus "pratique" qui apporte des réponses concrètes aux problèmes des intellectuels comme de ceux qui le sont peut-être moins...
On ne saurait oser parler d'humanisme en commençant par ne s'adresser qu'à certains humains sous prétexte qu'ils sont mieux outillés pour comprendre, non?
On devrait tous pouvoir adapter son langage à l'auditoire sans en perdre pour autant le contenu, faute de quoi beaucoup d'entre nous risquent de se sentir encore exclus ou dévalorisés.
Notre époque est friande des jargons de spécialistes pseudo-scientifiques, de grâce évitons cet écueil en matière d'humanité!
Respectueusement, Eric.

[CLM.]

Merci de votre propos, Éric. Je tiens à signaler à votre attention que la philosophie est langage et abstraction, dire l'abstrait, en le rendant saisissant, constitue le défi de tout philosophe; et, croyez-moi, si l'on se met à vouloir simplifier exagérément le langage philosophique, on peut finir, tout simplement, par tuer sans s'en rendre compte, la philosophie en tant que discipline langagière, à force de brimer son expression, sa hauteur, au point de l'altérer, au point de la masquer, la dénaturer par la réduction au simple. Une telle simplification réductrice priverait la philosophie de ce qu'elle est: langage conceptuel qui traduit les grandes réflexions et idées sur les problèmes humains qu'elle contribue à interroger pour en envisager la compréhension. Lesdits problèmes eux-mêmes étant souvent bien factuels mais abstraits et difficilement prenables voire imprenables par le langage ordinaire. Nous ne devons pas vider le discours philosophique de son essence à vouloir éluder les formes inhérentes au philosopher, sous prétexte de l'adapter à ceux qui n'en veulent pas.
Je suis comme vous, contre ce que vous appelez si bien "les jargons de spécialistes pseudo-scientifiques à la mode", toutefois, la philosophie, elle, n'est pas une pseudo-science, c'est une discipline, elle comporte un mode langagier tout simplement propre à elle, que ceux qui s'y intéressent, doivent quand même apprendre à comprendre... Le lecteur de philosophie doit désapprendre le goût très à la mode de la facilité-banalité de notre temps hypermédiatique, pour apprendre à s'adapter, s'élever au langage abstrait, c'est une exigence, un prérequis incontournable.
Cordialement, CLM, votre Blogueur

[Clovis Simard]

Blog(fermaton.over-blog.com)No.8- THÉORÈME SANDWICH. - Structure de la pensée pensante.