Par Camille Loty Malebranche
Il n’y a pas d’impartialité du sujet ni de neutralité de l’objet dans le jugement, tout procédé analytique pour objectiver les faits et les choses, tient au moins d’un parti pris pour la connaissance selon l’intérêt du sujet qui objective, c'est-à-dire construit et choisit son objet. Dans les relations humaines c’est la dimension du sujet qui prime et doit déterminer les rapports dans l’intersubjectivité qui transcende tout objectivité simple pour la complexité du jugement d’un être de conscience et de liberté qui ne se laisse pas définir mais participe à sa propre construction et élabore sa propre définition de soi en devenir.
L’objectivité, la neutralité, l’impartialité sont la trilogie idéale de posture interrogeante analytique et cognitive. Triplet instrumental qui informe sur le constat de la présence, la factualité du « il y a » dont l’accès immédiat ou médiat selon qu’il y ait usage d’instrument ou non, peut au niveau des choses et des faits, révéler la nature. Toutefois, c’est l’implication du sujet qui va rendre difficile le jugement juste et vrai quant au sens et conséquences qui, de toutes façons, seront appréhendées par les consciences herméneutiques avec toute la charge mnésique, ces engrammes de l’histoire personnelle qui conditionnent les herméneutes.
L’objectivité comme mode de jugement qui suppose le dépouillement du sujet considérant pour s’en tenir au strict objet, le fait, la chose posée pour en découvrir la vérité, constitue un idéal qui surplombe tous les paysages de la connaissance, de la philosophie à la science. On connaît toute la difficulté du sujet analysant pour se dépouiller devant ledit objet ainsi posé selon la volonté humaine. Car l’objet est une construction et non un donné naturel. C’est le questionnement de l’homme qui élabore le rapport d’objectivation. Alors l’essence même de l’objectivité, s’oppose à la neutralité cognitive puisque l’objectivation, l’acte de poser en objet, est un choix délibéré, un parti pris de la conscience humaine selon l’intérêt du sujet qui désigne tel ou tel fait, telle ou telle chose comme objet de son analyse. Quand l’analyse porte sur les faits humains, la neutralité cognitive est point de départ de la nature des relations interpersonnelles et du rapport à la société en général.
Dans le rapport à l’humain, "comprendre l'autre" comme sujet et conscience évoluante, comme liberté changeante et comme étant particulier pluridimensionnel est un butoir discursif. Les humains en action et contexte sont interactifs, et l’interaction est fondamentalement un lieu de manifestation à la fois de toutes les tares individuelles et de toutes les barbaries qui entrent dans les relations humaines structurées par les institutions de la société. Une structuration qui, on le sait, influence sourdement jusqu’aux réflexes de réaction des individus interagissant.
Ainsi, des partis pris inévitables empêchent toute neutralité dans les relations humaines: d’abord, l’expression de l’intérêt de l’individu selon son stade de conscience, ensuite l’incontournable conditionnement institutionnel des humains en relation sans oublier les nombreuses interactions contingentes qui les affectent. Les relations humaines sont faites d’interactions multiples. Interactions avec le temps, l’espace mais aussi et surtout avec les autres et avec l’espace culturel tant global (la société) que particulier (les institutions proches comme la famille, le milieu social). Le culturel est si important, si prismatique du relationnel par son façonnement de la nature humaine pure, qu'il rend parfois méconnaissable dans le rapport à autrui, la nature humaine dont la dimension éminente en métaphysique de l’esprit, est la nature profonde, l'hypostase substantielle, la personne transcendante de l'humain.
L’homme en relation avec son semblable, est un construit culturel et social qui ne se contourne pas, quelque affinitaires que puissent être les intentions et intérêts, quelque affins que soient les individus en rapport. D’où, un seuil nécessaire de tolérance et de distance pour sauvegarder la liberté et établir des rapports sains dûment bien choisis vu l’inconnaissable et l’imprévisible de l’autre conscience qui réagit et agit dans l’interaction que constitue chacun de mes rapports à l’humanité.
L’humain n’est, certes, jamais vraiment étudiable, objectivable, mais il se dévoile et émet des signes qu’il faille interpréter tôt dans les débuts d’une relation banale ou forte pour éviter tout piège, prévenir toute grave déconvenue.
Dans les vraies relations à hauteur d’homme, sans promiscuité ni sous-entendu grivois, c’est une saine approche intersubjective non objective non objectale, qui permet la compréhension de l’autre comme sujet, compréhension qui n'est guère définitionnelle mais intuitionnalité par le partage et le respect intersubjectif.
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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