Par Camille Loty Malebranche
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L'innocence n'est pas l'image d'Épinal de l'enfance qui n'a point commis de mal parce que simplement l'enfant n'a pas encore vécu dans la jungle sauvage des sociétés humaines; l'innocence est l'expression du caractère fort, combattant pour le bien et refusant la jouissance si tentante, si facile du mal malgré les incompréhensions et les souffrances. L'innocent est un guerrier du bien qui sait se reprendre lui-même s'il chute sans jamais se lasser de poursuivre l'amélioration spirituelle nécessairement morale qui prime en sa vie, tout son rapport à soi, à Dieu à autrui et à la nature...
L'innocence véritable est liberté intérieure de l'homme par la paix qu'elle lui fait éprouver, l'innocence postiche proclamée selon les lois socioétatiques qui maintiennent l'ordre injuste sévissant au monde - tout comme l'innocence déclarée du meurtrier acquitté par erreur, qui fait semblant d'y croire - n'est que pure crânerie, crânerie et mauvaise foi des oligarchies économiques et politiques pour ne pas faire face à leur conscience, ne pas affronter leur culpabilité objective dans les horreurs et souffrances du monde.
L’innocence véritable, ce sentiment de pureté de soi en son for intérieur qu’éprouve un être humain, ne peut être réduite au subjectivisme sans confrontation avec la justice vraie et effective de l’homme agissant, pas plus qu’elle ne saurait être le produit du satisfecit exprimé par une société en décomposition de sens et de valeur, qui justifie tout ce qui sert ses horreurs et condamne la vertu rebelle qui refuse ses errements.
L’innocence n’est pas juste une absence de culpabilité mais la justification globale de soi-même, qui ne vient point du moralisme extérieur officiel des institutions de gouvernants se faisant tailler sur mesure, une justice propre à leur mode de société, selon le fonctionnement de leur ordre du monde. L’innocence n’est pas non plus dans la complaisance individuelle avec les formes juridiques qui consacrent les pires injustices et privilèges contre les majorités.
Une spiritualité comme le christianisme révèle que l’innocence a pour prix, le plus lourd tribut métaphysique qui soit: le sacrifice sanglant du Christ qui, par sa mort, efface les racines du mal et la culpabilité spirituelle d’une humanité déchue. C’est que l’innocence ne s’acquiert point sans renoncement au profit immonde du système socioéconomique ni sans acceptation de quelques privations préférables à toute connivence avec la machine de maux dans lesquels les prédateurs de l’économie et de la politique entraînent le monde. L’innocence rejette les conjectures des élites corrompues et corruptrices avec leur chantage de fausses valeurs réductrices de l’humain à l'économique.
En cas de faute objective, le pardon est un don. Mais dans le monde idéologisé, méchant et crapuleusement accusateur où l’on culpabilise l’individu non assimilé pour l’excommunier, la capacité d’innocence tient de la transcendance des valeurs factices qui servent de critère d’évaluation des hommes au sein de la société. Naturellement, il y a des crimes vrais mais ils sont hélas plus proliférants chez les magnats adulés de la finance et de la politicaillerie du système étatique séquestré par quelques-uns que chez les masses placées par les élites dans des conditions favorisant la criminalité et la violence. Pour le reste, il y a l’accusation sourde visant à culpabiliser afin d’amollir, de débiliter le mental et le jugement des individus.
L’innocence, en ces occurrences d’ignominieuses agressions d’institutions et de foules contre l’individu, ne peut être que conquête mentale où l’homme culpabilisé par le faire machinal des cohues, se défait du mensonge qui l’accuse parce qu’il refuse la standardisation. L’innocence surmonte et vainc la culpabilisation des justes par quelques accusateurs professionnels du moralisme officiel. L’innocence est la force de caractère qui brise la culpabilité et projette la vie personnelle dans la pureté sans s’arrêter au mal convenu qui accuse le bien inconvenant.
Avec les miasmes volants de la malsaine logorrhée idéologique des moralisateurs officiels, véritables mouches invasives des contrevérités prêchées par la logique tronquée des oracles de l’ordre socioéconomique, qui accaparent la chaire du discours idéologique, toute la morale sociale gît dans la malignité des arguties de comptoir. L’innocence change donc d’acception, dès lors où le juge est investi par l’ordre du mal et que le criminel autorisé institutionnellement « libre » de piller et de faire mal au genre humain par la politique et l’économie, décide de ce qui est bon ou mauvais de ce qui est juste et criminel.
Dans un monde où les oligarchies financières et leurs politicards déshumanisés, déviés dirigent en orchestrant politiquement les pires crimes contre l'humanité jetée sciemment et impassiblement dans les misères de la pauvreté en pleine société d'abondance, dans un monde où par mimétisme, une horde morbide adhère aux principes abjects de l'économie qui, pourtant les broie, dans un monde, où les criminels autorisés des structures se croient tout permis et innocents parce que justifiés par la morale officielle, la claire conscience du sens est impérieuse pour cultiver l'innocence vraie qui émane de la justice.
Dans un monde où la culpabilisation, le soupçon, le harcèlement judiciaire et institutionnel sont l’art des dominateurs - car pour dominer et exploiter les hommes, faut-il bien les déposséder de leur confiance en eux-mêmes, les vider de leur estime d’eux-mêmes - l’innocence est la vertu d’affirmer la Justice sans se soucier des manipulations pseudo-éthiques des États, sans chercher à plaire à l’immonde morale pragmatique de la société grivoise qui, à coups de propagande, tisse le rétiaire de ses horreurs qu’elle érige sinistrement en valeurs et idéaux au mépris de l’humain.
L’innocence est l’antithèse de la candeur, car la candeur implique la crédulité et l’ineptie nonchalante face aux intentions trompeuses d’autrui. L’innocence exige l’emmétropie intellectuelle et logique pour démasquer les imposteurs, les criminels, les manipulateurs. L’innocent averti et clairvoyant ne se laisse jamais mener, car il sait que ce qui le rend innocent, ce sont les vertus de respect de soi et d’autrui, de charité manifestée dans la justice envers tous. Et pourquoi, toute innocence est conquête de soi hors des structures idéologiques de la reproduction sociale et du maintien du même au profit de quelques privilégiés. L’innocent, dès lors, se distancie des enseignements institutionnels : famille, institution religieuse, administration étatique, médias… L’innocence avertie et assumée finit toujours par prendre l’allure révolutionnaire, ne serait-ce que par le refus vertical du monde et de ses perversions de toutes espèces, comme engagement à son conatus qualitatif, sa subsistance triomphale dans un monde infâme de toutes sortes… L’innocent vif en son intelligence indomptable, dans sa répulsion du consensus social sans souci de justice ni de vérité, est donc un révolté actif contre l’illusionnisme axiologique d’un système ignoblement prostituant et prostitué dont le bien est ce qui convient au pouvoir des oligarchies qui voudraient assimiler tous pour en faire leurs automates.
L’innocence est donc l’action spirituelle, intellectuelle et morale pour le Bien transcendant comme principes personnels et contribution à la justice due à l’humanité. L’innocence est donc dès le départ affirmation par la personne humaine des principes d’édification de soi en entéléchie de son humanité intégrale, d’où, elle n’est jamais ni nonchalance, ni amorphisme, sachant que sa vérité est dans l’ascension de l’homme vers le vrai soi qui est Esprit et pureté.
Si en matière juridique, une sentence d'innocence prononcée par une cour soulage un accusé, c'est l'harmonie intérieure entre l'Esprit et ses valeurs métaphysiques, intellectuelles et morales assumées et projetées, harmonie essentiellement spirituelle et active de son Humanité, harmonie pour la justice envers soi et envers toute l'humanité, qui justifie et fait vivre l'innocence à une personne humaine, par delà tous les jugements extérieurs d'individu ou d'institution.
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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