A qui profite le trafic de drogues en Colombie ? Contre toute attente, et selon une étude de 2011 de l’université des Andes à Bogota, reprise par le Guardian le 2 juin 2012, lors de la publication de la version anglaise, le négoce de la cocaïne colombienne enrichit principalement les banques des Etats-Unis et d’Europe. Le journal britannique indique que c’est « la recherche la plus détaillée jamais réalisée sur l’économie de la drogue ».
Seulement 2,6% des profits restent en Colombie
D’après les économistes Daniel Mejía et Alejandro Gaviria, seulement 2,6% de tout l’argent généré par la production et le trafic de cocaïne reste en Colombie. Alors que 97,4% des profits de la drogue sont partagés entre les narcotrafiquants et les banques européennes et états-uniennes.
L’étude Políticas antidroga en Colombia : éxitos, fracasos y extravíos (Ediciones Uniandes, 2011) (Politiques antidrogue en Colombie : Succès, échecs et les mauvais virages), se fonde notamment sur l’année 2008, où les économites ont découvert que sur 300 milliards de dollars provenant de la production de cocaïne, seulement 7,8 milliards sont restés en Colombie.
« Si des pays comme la Colombie pouvaient bénéficier économiquement du commerce de la drogue, il y aurait un certain sens dans tout cela, déclare Alejandro Gaviria. Au lieu de cela, nous payons le prix fort pour le profit de quelqu’un d’autre. »
L’hypocrisie des pays occidentaux
Selon les chercheurs, cette situation serait due à l’hypocrisie des pays « consommateurs » (Etats-Unis, Royaume-Uni et l’Espagne) qui sont plus déterminés à obtenir des résultats dans la lutte contre la drogue que de s’attaquer au blanchiment d’argent. « Ils se limitent à chasser les petits poissons, ou les maillons faibles de la chaîne, mais ils ne s’en prennent jamais aux systèmes financiers », affirme Daniel Mejía au Guardian.
Cela serait aussi la conséquence du fonctionnement du système bancaire colombien. En Colombie, pour déposer 2.000 dollars, il faut une énorme quantité de paperasse, alors que dans les banques américaines, il y a la loi sur la confidentialité », indiquent les économistes.
« Nous savons que les autorités américaines ou britanniques en savent beaucoup plus qu’elles ne disent », explique Gaviria. « Mais c’est un sujet tabou de poursuivre les grandes banques », souligne Mejía.
Les mécanismes du blanchiment d’argent provenant de la drogue avaient déjà été mis en évidence par The Observer le 3 avril 2011. Notamment après une enquête montrant comment la banque américaine Wachovia(maintenant Wells Fargo) a permis de blanchir 376 millions de dollars provenant de la drogue mexicaine. Mais selon le Guardian, personne n’est allé en prison, et la banque ne risque plus rien aujourd’hui.
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