Lancement des TROIS PREMIERS VOLUMES (3)
de l‘édition de poche totalement refondue, de l’Éventail d’Histoire Vivante d’Haïti
pour devenir des ouvrages neufs, populaires, approfondis, et largement inédits en quinze volumes.
Par Leslie F. Manigat
Je suis tenté de m’amuser à dire que nous avions déjà, en histoire générale d’Haïti, le Thomas Madiou, un monument en sept tomes et le Beaubrun
Ardouin, une réplique en onze volumes de l’édition originale. Alors, pourquoi pas aujourd’hui mes quinze volumes de cinq cents pages chacun, en essais d’émulation? Lucien Febvre n’espérait-il pas
voir chaque génération faire mieux dans la connaissance de l’histoire?
Du nouveau chez Clio! Ainsi titrais-je, dans la revue «Optique» de Lucien Montas, mon compte-rendu critique du «magnum opus» du Dr Jean Price Mars
sur «La République d’Haïti et la République Dominicaine» en 1954. C’est le même cri qui annonce aujourd’hui comment l‘étude de la nouvelle histoire chez nous reprend son élan «revivificateur»,
comme la vie quotidienne a repris son cours. La vie reprend, la vie continue. Mais que de leçons à tirer de l’horrible tragédie du 12 janvier 2010? Notre façon d’écrire l’histoire en est sortie
toute changée.
C’est ainsi que le projet, annoncé l’an dernier, d’une édition de poche, totalement refondue, de notre ancien Éventail d’Histoire Vivante d’Haïti
pour en faire des ouvrages neufs, populaires et approfondis, comme contribution à l’histoire nouvelle d’Haïti qui s’écrit en «nouvelle histoire» en Haïti, se fait réalité, avec le
lancement, en ce mois de mai 2010, des trois premiers volumes, coup sur coup, de cette nouvelle série en édition de poche illustrée, comme les trois coups du destin de la cinquième symphonie de
Beethoven. Et puisque nous sommes à nous référer à la musique, on peut se hasarder à dire que la composition de ces volumes montre bien qu’il ne s’agit pas de manuel d’histoire au sens
propre du terme, ni du point de vue de la forme, ni du point de vue du fond. Par exemple, à propos des répétitions dans le texte, il y a, comme en musique, des redites voulues qui font partie
intégrantes de l’ensemble tel que conçu et structuré (Da Capo), des reprises pour changer de moments musicaux sans changer d’inspiration, et enfin des variations sur un même thème. Est-ce un
Traité? Sans doute plutôt. Mais le souci de totalité d’un ensemble diversifié et structuré en fait une synthèse globale. En somme, c’est une somme. Ces trois volumes veulent marquer les trois
coups successifs de la genèse de notre histoire. Et c’est avec le verbe que tout a commencé!
Nous, hommes de la parole, notre métier d’enseignant prend acte de ces trois premiers volumes de cette série de l’édition de poche sortis de
notre plume fouineuse pour viser d’abord l’audience des classes de baccalauréat et des classes propédeutiques de nos universités dont le programme correspond à leurs besoins professionnels de
lire er d’apprendre notre histoire nationale de peuple.. Nos trois premiers volumes couvrent le programme du baccalauréat haïtien. Une bonne aubaine intellectuelle pour professeurs et étudiants,
ces derniers légitimement obsédés par leur succès aux examens de fin d’études secondaires et aux épreuves des propédeutiques en histoire, en sciences politiques et sociales de nos Facultés et
Ecoles Supérieures. Mais l’honnête homme de notre vingt et unième siècle doit avoir pour bagage l’histoire de notre pays et d’abord, cette révolution d’indépendance dont nous contribuons à
assurer quantitativement et qualitativement par nos recherches, le renouvellement dans notre combat incessant pour les nouvelles idées en marche.
Le premier volume, de 465 pages, est intitulé «Une histoire nouvelle du Peuple Haïtien, la nouvelle histoire en Haïti», suivie de «Coup d’œil sur la
Société Coloniale Dominguoise à la Veille de la Tourmente Révolutionnaire». Le second, de 517 pages, a pour sujet et titre «La Révolution Haïtienne d’indépendance (1791-1806), ce séisme de
libération nationale anti-esclavagiste victorieuse, restée unique dans les annales de l’histoire universelle et dans l’histoire mondiale des révolutions de décolonisation». Le
troisième, de 647 pages, reconstitue, mieux: reconstruit «La Naissance d’Haïti à la Vie Nationale et Internationale 1804-1838», une entrée dans le concert des nations par le commerce
import-export, dans le contexte politique de l’hostilité des grandes puissances (white, slave-holding and colonial powers), percevant l’existence d’un état noir, indépendant, né d’une
révolution violente et abolitionniste, comme «ne anomalie, un défi, une menace» (Rayford Logan).
Du nouveau? D’abord, un détail d’importance qui n’en est plus un, une audace pédagogique pour notre jeunesse scolaire et universitaire en vue
de satisfaire son «besoin d’histoire», au tout début de chaque volume, une table des matières très détaillée comme jamais vue auparavant. Sur le modèle de ces «abstracts» qui donnent la substance
élaborée, en une douzaine ou quinzaine de pages serrées, du contenu structuré de l’ouvrage, comme un «digest», au point que le lecteur sait de quoi parle l’auteur, de quoi il traite et dans
quelle perspective, en ouvrant les premières pages. A la rigueur, il peut s’en contenter en attendant le plaisir de la lecture postérieure ainsi incitée par cette première approche didactique. La
compréhension historique est au-rendez-vous de ces comprimés apéritifs. Ce hors d’œuvre trouve un dessert dans la Table des illustrations qui suit immédiatement, montrant des photos assorties des
légendes informatives sur les personnages et scénarios présentés. Par exemple, la légende pour Toussaint à cheval sera «J’ai pris mon vol dans la région des aigles», pour Dessalines «On n’est pas
haïtien, si on n’est pas dessalinien» (Louis Mercier), pour Christophe «By all standards he was a great men» (Wilberforce) et pour Pétion « Il professe le républicanisme d’un
Jefferson et d’un Washington» (Dauxion-Lavaysse). Il y a quinze illustrations par volume.
Rappelons que l’auteur avait sollicité une contribution financière à des mécènes et à des fondations culturelles de nos banques, mais le 12 janvier
a eu pour effet de changer nos priorités vis-à-vis de l’impression des ouvrages à compte d’auteur, même dans le cas d’une entreprise de l’ampleur de la nôtre. Mais nous avons fait le maximum
quand même, en ce qui concerne le lancement de nos trois premiers volumes de la série, pour faire à notre triple audience intellectuelle (baccalauréat, propédeutique universitaire et grand
public), des conditions exceptionnellement favorables d’accès à nos publications, d’autant plus que nous éditons en collection de poche. Noblesse oblige!
Accommodant, on fixera, pour ces ouvrages de l’ordre de cinq cents pages chacun, un prix unitaire uniforme modique de mille (1000) gourdes
l’exemplaire, soit deux cent (200) dollars haïtiens, vingt-cinq (25) dollars américains ou vingt (20) euros. On connaît notre formule à l’adresse de notre clientèle intellectuelle: lire,
réfléchir, relire, faire lire et méditer, approuver, contester, gourmander, et surtout tirer profit en accompagnant nos lecteurs que l’on prend plaisir à remercier pour leur
fidélité.
Du nouveau? Le souci est de faire de l’histoire totale : récits analytiques et synthèses structurées, événements et conjonctures, géohistoire et
essais de psychanalyse existentielle, économies, sociétés et civilisations, religions, raison présocratique et raison cartésienne à cheval sur les deux rationalités haïtiennes: la rationalité
logique (le logos) exigeante des théorèmes et de la géométrie, et la rationalité magique du « merveilleux haïtien ». Notre histoire est une intégration d’ingrédients élémentaires pour une
mise à nu propice à l’auscultation du corps social, et elle se définit comme recherche de la complexité humaine. Elle est le refus des sociétés-modèles en faveur des modèles sociaux. Elle a
réglé son compte avec les exclusivismes d’antan d’un secteur marxiste dogmatique qui a fait son autocritique, et avec la stupidité hier encore médiocre d’un secteur noiriste fascistoïde, et ceci,
au nom humaniste du post-marxisme et du post-noirisme dont il nous faut tirer profit.. L’haïtianité se découvre à tous ces carrefours d’expérimentation de l’itinéraire historique de notre
identité de peuple et cette haïtianité demeure, malgré l’intensité heuristique de nos échanges et la marche vers la mondialisation, notre différence incommunicable.
Ne soyons pas hypocrite: cette haïtianité a toujours porté le sceau de l’ethnicité identificatrice, que certains de nos compatriotes le veuillent ou
non. On est, et on est perçu comme, un pays nègre (noir et mulâtre). La question du primat de la race, surdéterminée qu’elle ait été ans la réalité historique de Saint-Domingue-Haïti, et de son
sous-produit la question de couleur, ont été souvent à l’affiche de l‘actualité, au tableau de bord de notre pilotage de destinée de peuple. C’est un fait incontestable. Mais, leur complexité, à
travers leurs variations d’intensité, m’a offert l’opportunité de m’amuser à lister au moins dix-huit dichotomies et non pas une, qui concourent à la position de «la question sociale» en termes
de division et/ou d’union, aux racines de la production, de la répartition, de la circulation et de la consommation des richesses. Ne simplifions pas nos analyses, compliquons-les !
En des pages neuves, nous explorons le constitutionnalisme dessalinien en sept versets de l’évangile politique du fondateur et en douze tables de la
loi dessalinienne. A lire ! Les moins de trois ans de l’expérience dessalinienne au pouvoir sont l’objet au second volume d’un traitement d’analyse «totale globale» du fondateur et de son temps.
On s’est arrêté sur des thèmes contestés comme la compétence de Dessalines au pouvoir, pour se transformer, d’homme de guerre en homme de paix, son absolutisme, ses traits de caractérologie de
«primaire, actif et émotif» (un sanguin? un sanguinaire?), sa bonté native jusqu'à la naïveté candide, sa perméabilité à subir les influences de son entourage, sa spontanéité compatible
avec une dose de calcul rusé, sa rigueur tempérée par une complaisance complice, ses atouts dérivés des impératifs de son usage personnel du pouvoir jalousé par des collègues militaires
jouant à l’indépendance par rapport à lui, ses contradictions, sa sensibilité altruiste, sa philosophie sociale, cette riche étoffe humaine trop à l’étroit du corset des conformismes
de ceux d’en haut alors qu’il était à l’aise avec les savoir-faire de ceux d’en bas, et voilà qui fait déjà parler d’un Dessalines de Manigat, comme on a déjà parlé du Toussaint de Manigat il y a
quelques années. Et puis cette gestion de l’économie d’après la tempête dont les statistiques et les appréciations de Madiou pour le commerce extérieur de 1804 à1806 illustrent l’analyse
qualitative des problèmes et des solutions appréciables à leur juste valeur, dans le contexte du caporalisme agraire à intentions socialisantes d’un régime policier. Camper un homme en dépeignant
son destin.
Mais en des séquences saisissantes, nous scandons les neuf coups de force qui ont jalonné l’ascension fulgurante de Toussaint Louverture qui a
obligé ses rivaux l’un après l’autre, a être brisés en devenant inexorablement, des obstacles à éliminer sur son chemin: exit Galbaud, exit Sonthonax, Exil Maitland, Exit Vilatte, Exit
Hédouville, exit Moise, exit Roume, exit Rigaud.
Mais cette chronologie des neuf coups de force et d’éclat ne doit pas faire oublier les dix instruments de la conquête du pouvoir (à
apprendre par cœur?) par le stratège consommé d’un ancien esclave reconnu comme «un être extraordinaire par ses partenaires, par ses adversaires et par la postérité. On rappellera le mot trop
connu «Il n’y a qu’un seul Toussaint Louverture et qu’à son nom, tout le monde doit trembler». On y retrouvera, bien sur, l’analyse classique remaniée des douze facettes du génie de Toussaint
Louverture, mais aussi des dimensions et aspects des relations internationales de Toussaint qui sont présentés sous une lumière originale et instructive, hissant Toussaint à la hauteur du
dialogue d’égal avec Pitt par Maitland interposé au service de Sa Majesté Britannique, avec Jefferson, son «quasi-allié) et avec Napoléon. Une analyse inédite montre la crise de la grande
propriété dont on continue à dire sans nuance que Toussaint est le garant, et montre aussi, sinon même surtout, la solution qu’il apporte avec le régime portionnaire de rétribution qu’il
substitue sciemment à la grande propriété coloniale blanche déclinante dont les propriétaires l’accusent en France de sonner le glas. Des pages audacieuses ont permis une investigation sur la
diversité, la constance et la hardiesse des rapports de Toussaint avec les anglo-saxons dans tous les domaines, jusqu'à la participation américano-anglaise dans les deux phases des guerres
de l’indépendance haïtienne en situation concrète de belligérance. Les forces navales américaines sont restées engagées aux côtés de Toussaint jusqu’au bout, qui, en retour, avait consenti en
faveur des vaisseaux marchands battant pavillon étoilé, le bénéfice de la clause de la nation la plus favorisée de fait, dans les échanges commerciaux avec son ile devenue «son domaine».
Leclerc revenu en 1802 a dénoncé constamment dans ses rapports au premier consul le parti-pris délibéré louverturien contre le système de l’exclusif ou pacte colonial et par contre sa politique
de donner le monopole aux américains en matière de commerce international.
Il est bien vrai que LES MASSES ONT FAIT LA REVOUTIION HAITIENNE D’INDEPENDANCE, MAIS SOUS LE LEADERSHIP DE DEUX MENEURS D’HOMMES, L’UN POUR LA
COMMENCER ET L’AUTRE POUR LA TERMINER. Malgré l’inimitié finale de leurs relations historiques, le passage de l’un et l’autre successivement a rendu possible de se rendre compte que le précurseur
puis le fondateur ont été les CO-CONSTRUCTEURS de la nation haïtienne.
On ne saurait arrêter cette présentation sans souligner la nature «national-indigéniste» de la révolution haïtienne d’indépendance analysée dans ces
trois premiers volumes de la nouvelle édition de poche totalement refondue de notre ancien Eventail d’Histoire Vivante d’Haïti, notre révolution qui a dû attendre la révolution mexicaine de 1917
pour découvrir une révolution-sœur en affirmation de «National-indigenisme», ou les temps de Sandino dans les années 1930s en lutte de classes et de races pour la libération de son peuple
nicaraguayen et de tous les peuples opprimés de l’Indo-Amérique Latine, et trouver aujourd’hui des répliques sinon des sosies dans les expériences national-indigénistes à l’offensive en Amérique
centrale et andine au jour d’aujourd’hui.. Comme quoi, avec les révolutions national-indigénistes de l’Amérique Latine contemporaine, il y a de l’ethnicité dans l’air.
L’aventure qui commence, avec la parution des trois premiers volumes de notre nouvelle édition de poche de l’Eventail d’histoire vivante d’Haïti,
sur les quinze annoncés, promet de faire vivre l’histoire nouvelle telle que «nouvelle histoire» chez nous, pour des générations de «fans» de l’étude scientifiquement conduite de l’évolution
historique plus que bicentenaire de notre peuple encore souffrant d’avoir été pionnier.
Leslie F. Manigat
PRESENTATION MEDIATIQUE des TROIS PREMIERS VOLUMES
de l’édition de poche totalement refondue en 15 volumes a paraître, pour en faire des ouvrages nouveaux, populaires et pratiquement inédits, de
l’ordre de cinq cents pages chacun, de la nouvelle série de notre Eventail d’Histoire Vivante d’Haïti. Un divertissement intellectuel pour saluer le lancement en ce mois de mai 2010, de la
nouvelle série des trois premiers volumes des ouvrages de l’édition de poche de l’EVHIVIHA
La tête d’abord, les mains et pieds ensuite, pour l’action impérative de changement qui nous sollicite tous, jeunes et vieux
Cela peut paraître étrange ou simplement insolite de me voir commencer ȧ consacrer ma présentation médiatique des trois premiers volumes
de l’édition de poche de la nouvelle série d’ouvrages que je porte sur les fonds baptismaux en ce mois de mai dit printanier sous d’autres cieux, par une réflexion sur l’art et l’importance de la
communication en histoire d’Haiti.en guise d’introduction. Et cependant, c’est bien ce que je me suis résolu à faire à l’intention de tous ceux que le besoin de communication amène a fréquenter
les faiseurs de l’opinion publique en les traitant en collègues, comme nous les historiens professionnels. L’histoire est traitement de l’information. La dédicace postule que comme pour les
porteurs de la parole médiatique et comme pour les historiens, le champ des connaissances de la réalité est pluridimensionnelle au point que tout ce qui est information ne doit échapper ni être
étranger aux uns et aux autres de ces deux catégories de professionnels en synergie. C’est un des nôtres qui a écrit: «Le bon historien est comme l’ogre de la légende, il sait que lȧ où il flaire
la chair humaine, là est son gibier». L’information, c’est de l’or, comme j’aime ȧ dire.
Ceci dit, l’aventure intellectuelle à laquelle je viens de m’atteler, avec la publication en édition de poche de mon Eventail d’Histoire Vivante
d’Haïti en 15 volumes dont les TROIS PREMIERS sont en train de paraitre en ce mois de mai courant à l’occasion de «Livres en Folies 2010» m’a mis à l’esprit cette constatation que souvent ceux
qui m’interrogent (ou me contestent) ne savent pas lire, en ce sens qu’ils ne prennent pas la peine de faire attention a ce que je dis ou écris comme communicateur.. Hier encore, on m’a cru trop
enclin à censurer, ȧ gauche les communistes et à droite les duvaliéristes, les premiers au cours de polémiques d’un autre âge dont les échos se font entendre de temps en temps dans les souvenirs
des intellectuels d’alors, les seconds au rappel, pourtant objectif sous ma plume, de cette période dure du duvaliérisme franҫoisiste dont le bilan, dans sa version négative, a accumulé une
quarantaine de milliers de victimes. Une hécatombe. Et dans sa version positive? Mais on feint d’oublier que, dans mes écrits d’historien professionnel, j’ai essayé de comprendre, de faire
comprendre et d’expliquer le phénomène du «fascisme de sous-développement» d’alors, avec la sympathie sans laquelle il n’y a pas de connaissance objective d’autrui possible. Staline était capable
d’une courtoisie affable et souriante de «petit père des peuples» à ses meilleures heures, et Duvalier était, à ses meilleurs moments, un être humain de sensibilité émotive même à l’égard
de ceux ou celles qui le combattaient les armes à la main. Mais et pour l’un et pour l’autre, ce n’est pas la figure dominante du personnage passé à l’histoire. L’exemple est là, en ce qui me
concerne, des marxistes dont je ne partageais pas l’idéologie, alors que j’ai exprimé publiquement mon admiration pour de grands écrivains communistes comme un René Dépestre, un Jacques Alexis ou
un Gérard Pierre-Charles. Mieux: c’est moi qui ai fait connaître le mot alors remarquable de mon maitre Lucien Febvre écrivant à Marc Bloch, co-fondateur des Annales avec lui, pour lui dire
que, vu la tendance des études scientifiquement conduites en histoire, le moment est à envisager que le marxisme, ou une de ses formes en tout cas, sera reconnu par les Annales comme la science
de l’histoire. C’est pourquoi une École des Annales anti-communiste a été une invention fantaisiste ou un excès verbal de certains dogmatiques parmi les disciples de Marx et d’Engels. Ne pas être
communiste ne signifie pas être anticommuniste ! Bien des études de Lucien Febvre et de Marc Bloch ont été menées à bien «à la lumière du marxisme», sans être pourtant marxistes patentées. Mieux:
à l’Université française, des historiens de renom ont été marxistes et membres de l’Ecole des Annales à la fois, tels Pierre Vilar, Ernest Labrousse lui-même (?). Non communiste de conviction, Je
n’ai pas dit ou fait autre chose, et n’ai pas l’intention de dire autre chose, - le philosophe Loti Mallebranche est en train de poser le problème d’un
matérialisme dialectique qui ne serait pas athée ! - maintenant qu’on est dans un post-marxisme dérangeant pour certains, mais fécond.
D’autres, aux petits pieds et à la petite cervelle, essayaient d’accoler une étiquette supposée infamante de «noiriste» à ceux qui avaient la
lucidité de voir le racisme dont les noirs ont été victimes et sont encore victimes (moins aujourd’hui, il est vrai) dans une société privilégiant la peau claire, préjuges d’un autre âge?
Il faut savoir lire quand on fait de l’histoire pour ne pas confondre le criminologue avec le criminel! Cette mise au point devrait éviter tout malentendu à propos d’un mot récent mien, que je
revendique évidemment. au sujet d’un secteur marxiste dogmatique d’hier aujourd’hui sous autocritique. Voila qui introduit ma « Présentation médiatique des TROIS PREMIERS VOLUMES de l’édition de
poche totalement refondue pour en faire des ouvrages nouveaux, populaires et pratiquement inédits de l’EVHVIHA, non sans hypothèses, mais sans préjugés, à paraître en 15 volumes, si Dieu nous
prête vie.
Histoire objective, égo-histoire, histoire subjective, histoire introspective, histoire immédiate, histoire du présent, tout est dans le
dosage et dans la méthode critique. J’ai écrit à l’encre forte cette phrase autobiographique que «j’ai trainé mon moi dans le nous de l’histoire». C’est une des clefs d’explication de ce qu’on
appelle mon flair historique dans des pressentiments événementiels comme dans des avènements ou des chutes de chefs d’Etat. En décembre 1985, quand mes étudiants et mes auditeurs de l’Université
Antilles-Guyane où je faisais chaque année une mission d’enseignement sur l’histoire de la Caraïbe dont je m’étais fait un spécialiste régional politologue précoce, pendant douze années
consécutives (1972-1984), me retrouvèrent à la grande séance publique de clôture où je posais les questions d’actualité sur la région, pour la Noel, à la question : quel sera le thème
probable ou plausible de la grande conférence publique ex cathedra pour l’année prochaine 1986, au lieu de ma réponse classique que l’historien n’est pas nécessairement prophète, mais peut faire
des projections sur l’avenir comme en démographie, j’ai entendu ma voix répondre spontanément à l’adresse de mes auditeurs du grand amphithéâtre de l’UAG: il n’y aura pas d’année prochaine pour
ce cours! Analyse, air du temps ambiant imprégnant l’état d’esprit général, prévision, prédiction, ou pressentiment? Pourquoi pas un peu de tout cela?
La recherche du VRAI humain, dans la familiarité avec les êtres de chair et d’esprit, ce que j’appelle le vécu historique réel, demeure mon
souci, mon obsession d’historien-politologue professionnel.
Les annonces de la parution simultanée des TROIS PREMIERS VOLUMES de la nouvelle édition de poche dont la série comportera 15 volumes ont été
lancées il y a une semaine à peine dans la presse et dans l’internet, comme dans les conversations qui défraient la chronique de l’actualité non-politiquement activiste. Il s’agit
maintenant d’en faire une brève analyse de réflexion méditative pour l’information et l’édification de ce que nous avons appelé notre audience privilégiée: les élèves candidats aux examens
du baccalauréat, les étudiants candidats ou non aux examens des propédeutiques universitaires en histoire, et en sciences sociales et politiques, et enfin notre grand public lettré. Dire
autrement cette histoire des deux cent ans d’existence nationale du peuple haïtien, durant les cent vingt-quatre ans de l’espace-temps de 1791 à 1914, dans lesquels notre histoire est restée
officiellement et orgueilleusement nationale, est notre propos ici, juste après la révolution victorieuse de l’indépendance haïtienne, conjoncture fondatrice au sens propre, suivie de trois
phases de la vie d’autogouvernement (self-government) des haïtiens par eux-mêmes, malgré une dépendance structurelle pérenne dans le contexte d’un karma de malheur certes hélas,, mais permissif
de trouées à travers lesquelles se faisaient les tentatives de libération nationale dans la fierté et l’orgueil du sentiment de la dignité et de la grandeur nationales.. C’est que les assises de
l’édifice national, malgré déjàȧ des fissures et des lézardes, étaient solides avec l’existence, et la réputation surfaite sans doute un peu, d’un bonheur vivrier sous le régime de la petite
propriété paysanne et la domination d’un import-export, source principale de la richesse dans notre partie occidentale de l’ile. les deux assurant un fondement solide mais inégal aux
relations sociales de l’entité haïtienne globale.. Haïti, malgré sa réputation de turbulence politique sismique, est aussi le pays où on accepte tout trop facilement. Je l’ai dit et répété : on
devrait apprendre à savoir refuser! Je me suis demandé si le désarmement général de la population opéré par l’occupation américaine en 1915 n’en est pas une des explications alors qu’avant, tout
citoyen avait sa carabine chez lui.
La tranche d’histoire nationale de 1804 à 1914 s’est terminée avec l’intervention militaire nord-américaine, pour inaugurer une autre tranche
d’histoire marquée par trois interventions militaires et occupations étrangères, 1915, 1974 et 2004, lesquelles ont abouti ȧ la mise sous tutelle du pays officiellement sous l’égide des
Nations-Unies. Ces trois tranches d’histoire, 1806-1914, 1914-1974, 1974-2004, méritent un bref rappel introductif pour faire mieux assimiler et situer les trois premiers volumes permettant de
montrer les constantes et les variables de l’histoire haïtienne en œuvre dès les premiers temps.
Voici d’ailleurs, sans plus tarder, la présentation médiatique brève – un paragraphe - du sujet et du contenu de ces trois premiers volumes de
la nouvelle série de l’édition de poche prévus en quinze volumes au total, de l’ordre de cinq cent pages en moyenne chacun:
Premier volume. Le premier volume, de 465 pages, est intitulé «Une histoire nouvelle du Peuple Haïtien, la nouvelle histoire en Haïti», suivie de
«Coup d’œil sur la Société Coloniale Dominguoise à la Veille de la Tourmente Révolutionnaire».
Deuxième Volume. Le second volume, de 517 pages, a pour sujet et titre: «La Révolution Haïtienne d’Indépendance (1791-1806), ce séisme de libération
nationale anti-esclavagiste victorieuse, restée unique dans les Annales de l’histoire universelle et dans l’histoire mondiale des révolutions de décolonisation».
Troisième Volume. Le troisième volume, exceptionnellement de 647 pages, reconstitue, mieux: reconstruit «La Naissance d’Haïti à la Vie
Nationale et Internationale 1804-1838», une entrée dans le concert des nations par le commerce import-export, dans le contexte politique de l’hostilité des grandes puissances (white, slaveholding
and colonial powers), percevant l’existence d’un état noir, indépendant, né d’une révolution violente et abolitionniste, comme «une anomalie, un défi, une menace» (Rayford
Logan).
Ce travail dans lequel ont été investis les efforts d’initiatives et d’analyses d’un historien-politologue professionnel qui a surtout défriché, en
un premier temps, cette période fondatrice de 1791 à 1838, avant de déployer son attention sur la période nationale toute entière (1804-1914), qui est restée nationale malgré le grignotage
progressif de notre souveraineté se rétrécissant comme une peau de chagrin après la crise de l’année de la débâcle financière de 1896, cette faille qui a traversé de haut en bas la réalité de la
production, des finances, de la fiscalité, et du coût de la vie pour se transmettre a la vie parlementaire, gouvernementale, bureaucratique et judiciaire du pays alors en prise avec une
corruption sans précédent dont les rapports diplomatiques (dépêches espagnoles, françaises, américaines) et la presse locale, soulignent l’ampleur inaccoutumée a ce degré. Et nonobstant, la
barque de l’Etat, sur ces mers démontées par le démon de la politique, poursuivait son chemin avec le personnel politique post-salomonien discrédité, avec des candidats à la présidence de valeur.
Mais politiquement malheureux. .La sauvegarde, malgré tout, de la souveraineté nationale a contribué â l’illusion utopique de la pérennité de l’Haïti Chérie, dans la verticalité nègre d’une
indépendance pourtant déjà de «fac-similé». Mais l’indépendance haïtienne au drapeau national flottant depuis 1804 , assortie du «droit à l’égalité» pour ne pas être éphémère, a vu se faire avec
succès, la mue de la société créole devenue la société traditionnelle à la suite du renversement de vapeur d’un courant a l’origine anti-dessalinien national-indigéniste, en faveur d’un
contre-courant oligarchique conservateur métis (un règne pigmentocratique) devenu le courant principal dominateur ancré dans la nature sociale inégalitaire mais acceptée par la collectivité,
faute de mieux. On trouve beaucoup à expliquer en histoire à condition de pouvoir et savoir l’interroger.
L’ouverture par l’initiative américaine, de cet isolat haïtien protecteur de la souveraineté mais au prix d’avoir raté la modernisation, a inauguré
l’ère de la domination étrangère distribuée en trois tranches d’histoire néocoloniale : 1915-1934, de 1934-1974, 1974- 2004, avec le coup d’arrêt initial prémonitoire de 1896, dont la conclusion
a mené de la stagnation à la décadence, puis de la décadence à l’abime. L’indépendance nationale, à son zénith de 1804 à 1896, aurait pu continuer à réussir son cycle historique avec la
génération de modernisateurs haïtiens de 1896 à 1912 hélas malheureux en politique, mais comme indépendance de dignité, de panache sinon de donquichottisme, elle a butté contre la
volonté de puissance et de domination des vues, objectifs et intérêts et convoitises de l’étranger mobilisateur du statu quo, jouant au freinage de la révolution modernisatrice nécessaire mais
impossible, de ceux que Sténio Vincent appelait les «décrocheurs de lune».
Aussi peut-on dire, en arrêtant ces réflexions de présentation à la parution des trois premiers volumes de l’édition de poche totalement
refondus pour en faire des ouvrages neufs, populaires et pratiquement inédits de notre édition de poche prévue en quinze volumes,, cette vérité que, foi d’historien-politologue professionnel:
«L’INDEPENDANCE NATIONALE HAITIENNE, malgré ses failles structurelles, conjoncturelles et événementielles internes ou endogènes, N’EST PAS MORTE DE SA BELLE MORT, MAIS ELLE A ETE
ASSASSINEE».
Leslie F. Manigat
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