Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Par Camille Loty Malebranche

 

 

L'idéologie est l'univers de la démonstration autoritaire ostentatoire et de la monstration autant séductrice que dissuasive.

 

Dans le domaine des fictions fondatrices établissant les identités collectives, ces mythes hiératiquement et politiquement orchestrés par les autorités qui y conçoivent artificiellement les entités telles la Nation, l'État, la "race" (terme créé pour magnifier l'ethnie) comme transcendantes, supérieures par essence à l'altérité, il ne faut jamais abstraire le fait que ces types de constructions identitaires procèdent généralement en doctrinalisant lesdites entités ainsi créées.

 

L'identité est doctrinalisée à travers l'essentialisation des composantes et états de faits sociaux par la politique ou par la religion en se distinguant des autres; la fonction différentiante étant le touchau de la mouvance identitaire, l'identité étant, comme je le dis ailleurs, l'altérité radicalement autre de tout altérité possible, la différence distincte de toute différence ressemblante ou dissemblante.

 

Avec l'avènement des sociétés clivées et idéologisées, la naissance des idéologies, ce qui était simplement différentiant a eu comme le besoin d'affirmer avec fureur la différence ténue et dérisoire, différence quasi imperceptible des semblables très proches. Et c'est sans doute cette différence de proximité qui motive les haines extrêmes où l'on voit des proches à peine différents de la même société ou relevant de sociétés semblables congénères, se faire parfois des guerres de loin plus acharnées, plus exterminatrices que celles entre entités totalement autres! Force est de souligner que les identités idéologiques ne doivent pas être confondues avec l'identité ontologique, vu que le concept d'identité réfère essentiellement aux deux catégories ontologique et idéologique. Là, il faut comprendre que l'identité ontologique évoque la nature, (constitution d'un être, d'une entité ou d'une catégorie d'êtres: espèce, genre, individu), alors que l'idéologique est une construction artificielle (non naturelle) des humains définissant un être, une entité, une situation ou bien se définissant eux-mêmes pour se distinguer... 

 

L'exigence de toute mouvance sociale de conserver ses membres ou partisans conquis et de continuer à en conquérir, oblige les dirigeants à montrer la méliorativité de ladite mouvance (son essence meilleure) très ostensiblement pour enflammer la partisanerie,  hors de toute ressemblance avec autrui. L'idéologie - ce justificatif politique, logique et moral du pouvoir social - porte en soi, par essence, une appétence d'exhibition, une propension naturelle à l'ostentation de sa prétention à une unicité supérieure; une distanciation obvie pour se conforter encore et encore. Car une différence non assez ostensible manque de persuasivité pour enflammer voire fanatiser ses partisans et puissamment dissuader des contempteurs. C'est pourquoi en idéologie, tout, le discours, la gestuelle, la symbolique, doit contribuer à montrer et exhiber l'identité proclamée meilleure par rapport à la différence, en arborant ladite identité en bannière d'existence, et de raison d'être au service de l'authenticité. Puisque de toute manière, le fait de l'idéologie, c'est précisément de se proclamer authenticité exclusive en fustigeant l'altérité comme inauthentique et impostrice. 

 

Ressemblance abhorrée par des antagonistes proches. 

  

La plupart des antagonismes, à tout le moins, les plus violents, les plus virulents tiennent souvent à des nuances et non à des différences d’essence ou de projet. Et pour cause, quand l’altérité des essences est fondamentale et l’éloignement, irréductible, les contraires se reconnaissant tels, se séparent et ne se parlent plus, par rejet réciproque purement et simplement. Chacun va alors cultiver son champ, gérer son espace, entretenir son domaine. Les antagonismes, dans cette dernière occurrence, et leurs combats, s’amenuisent, se raréfient voire s’effritent.

 

Par manière d’illustration, les chocs entre catholicisme et protestantisme, entre sunnites et chiites, entre extrême droite et droite modérée ont été dès le départ ou sont devenus (sauf dans le cas du capitalisme et du communisme, antagonisme clairement en violent conflit depuis qu'ils cohabitent dans le choc des projets de société), de loin plus ardus que ceux entre chrétienté et bouddhisme, entre extrême droite et social-démocratie… Et, même, si nous considérons les deux grandes guerres mondiales, elles ont toutes deux été essentiellement intercapitalistes, menées donc à l'intérieur du capitalisme par des puissances capitalistes, même si l'Urss fut envahie par Hitler à la seconde conflagration! Comme pour nous signifier que dans l'histoire, de nombreuses guerres se font entre semblables en terrible aversion réciproque, telles en ces occurrences de guerres mondiales, où ce sont des clans de puissances colonialistes et impérialistes se haïssant dans leur ressemblance rivale où chaque clan se proclamant, se voulant le seul civilisé, l'unique authentique face à l'autre dans leur commune posture capitaliste, l'a violemment, bellicistement exprimé jusque dans l'horreur guerrière, encourant sans état d'âme l'extermination de millions de victimes, pour exorciser la ressemblance et affirmer son orgueil et sa prépondérance fictive par une unicité improbable, imaginaire...

 

En continuant cette réflexion, nous ne pouvons ne pas penser aux pitoyables bévues historiques commises par des peuples ressemblants, qui, par cécité rivale et chauvinisme grotesquement haineux, ont vendu leurs proches, leurs cousins ennemis pour se faire occire après par d'impitoyables lointains ennemis racistes extrêmes et exterminateurs des deux antagonistes en présence! Les cas sont assez fréquents dans le "Nouveau Monde" conquis par les colons européens d'Amérique où des tribus locales s'allièrent avec l'envahisseur contre leurs voisins haïs, tout comme ces tribus africaines qui vendaient leurs vaincus aux marchands d'esclaves blancs, occasionnant un des plus grands génocides de l'histoire, celui des noirs à travers la traite et l'esclavage, sans toutefois se protéger de la colonisation à venir plus tard sur leur tête d'aliénés. La proximité d'une inimitié semble l'exacerber, la rendant de loin plus émotivement haineuse, rageuse dans l'imaginaire pulsionnel que l'agression venant de loin quelque plus terrible soit-elle! Quelque génocidaires des rivaux que puissent être les agresseurs totalement étrangers et venant de très loin!

 

L’affirmation par la différentiation radicale étant la marque de présence des idéologies, les idéologues, les meneurs pourfendent donc énergiquement, voire exorcisent en les diabolisant, tous rivaux trop proches par certaines caractéristiques de base. De fait, exhiber les spécificités et particularités qui assoient l'unicité de la mouvance présentée absolue, ne peut se faire que par la diabolisation du ressemblant à peine différent dans les manières, sans prendre garde aux dangers d'intrusion ainsi avantagée de leurs prédateurs communs, leurs exterminateurs totalement étrangers... 

 

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

Copyright © CAMILLE LOTY MALEBRANCHE - Blog INTELLECTION -  2013

Politique de Reproduction

Les textes du Blog INTELLECTION peuvent être reproduits, en tout ou en partie, gratuitement, à condition d'indiquer clairement la source http://intellection.over-blog.com/, avec lien actif vers notre site. Dans le cas de la reproduction sur un support autre qu'Internet, la mention de l'adresse du Blog INTELLECTION (http://intellection.over-blog.com/) est exigée.

Tag(s) : #Monde du Concept
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :