Par Camille Loty Malebranche
L’un des faits les plus probants de la barbarie, c’est l’infliction de souffrances humaines objectives, sciemment, expressément provoquées et assénées par l’homme à son semblable au nom d’une idéologie ou d’une conception essentialiste de la supériorité non par l’action ou le comportement qui peut être digne ou indigne, mais par l’appartenance sociale, autorisant la déshumanisation de l’autre. En ce sens, par sa bassesse, la civilisation avec ses violences sociales, religieuses, politiques est souvent une déshumanisation, une autodéshumanisation culturelle, une barbarie à rebours.
La sauvagerie est soit une pulsion primaire d’un animal naturellement violent, génétiquement programmé pour la violence; une réaction pulsionnelle, réflexe. Quant à la violence individuelle non inscrite dans une culture, elle est une sauvagerie, une bestialité inhumaine par déshumanisation du violent, mais pas à proprement parler de la barbarie; car il s’agit en ces occurrences de la nature animale, part forte, fortement présente de tout être humain, non dépassée par ledit individu en situation, la brute primitive en gesticulation grossière de son infériorité mentale, intellectuelle et spirituelle.
La sauvagerie manifestée en cruauté à l’égard d’autrui, la maltraitance, la pseudomorale autopunitive - l’autoflagellation facticement moraliste - qui empêche de vivre, deviennent barbaries quand elles sont inscrites dans le sinistre des valeurs colportées dans le sérail d’une culture, une hexis érigée en praxis dans le faire social. Tel le cas de cette secte qui appelle ses dirigeants « esclaves avisés » pour les soumettre à un rigorisme sexuel impossible qui voudrait désexualiser les jeunes! La simple appellation inconvenante, d’ « esclaves avisés » pue l’aberration la plus balourde et la plus insensée puisque précisément dans les deux testaments sans cesse brandis ad nauseam par ladite secte, Dieu n’a jamais fait que libérer l’homme au point que les deux visages emblématiques des testaments sont respectivement les deux plus grands libérateurs spirituels de l’histoire sacrée que sont Moïse et Jésus-Christ.
La barbarie se reconnaît, entre autres, par le fait de provoquer voire de menacer autrui comme le fait aujourd’hui, par les manigances de l’Otan selon la crise géopolitique plurale de l’occident en déclin, pour tenter de se maintenir unique maître du monde mettant ainsi le monde aux bords du danger nucléaire que colporterait une troisième conflagration mondiale! L’hubris aveugle et impassible de ne pas se soucier des débordements possibles de ses ambitions malsaines, c’est de la barbarie. Aussi barbare et même pire que le fait d’agresser ou maltraiter l’autre pour sa différence! Provoquer pour une altérité jugée rivale est l’équivalent géopolitique de l’agression ethnique de l’autre jugé culturellement mauvais pour sa nature et non par une pratique indue choisie et qui menace ou agresse quiconque.
On a le droit de refuser des pratiques objectivement indues de l’autre dans l’espace public et de refuser qu’il en fasse propagande. Cela est la part juste de toute culture et le pouvoir régalien de toute société humaine. La barbarie, c’est quand pour marquer sa supériorité d’identité, l’homme, le groupe, l’institution sociale ou l’État inflige méchamment des sortes de misères punitives à l’altérité parce qu’elle est autre; c’est la méchanceté, la violence agressante par le mal asséné à toute alterhumanité (humanité différente) pour ce qu’elle est et non ce qu’elle fait comme une pratique culturelle agressive ou autres bévues causant préjudice physique ou moral à quiconque; c’est aussi la propension de tout individu à s’ériger bourreau qui écrase l’autre pour le forcer, l’amener à la soumission afin d’assouvir son ego, son orgueil de dominateur.
La barbarie est toujours en quelque sorte un grave déficit d’humanité du barbare qui - de sa propre humanité en crise et décomposition, qu’il ne peut même plus éprouver et assumer - nie l’humanité d’autrui.
Barbarie, attitude méchante idéologisée d’une institution, d’un groupe ou d’un individu provoquant objectivement de la souffrance par mépris de l’altérité ou pour briser l’insoumission de sa victime ainsi vouée à la maltraitance. La barbarie est toujours l’expression d’une insanité afflictive dans le rapport à autrui faisant subir à celui-ci la cruauté du barbare. Bien des barbares sont adulés dans notre société altérée en son jugement par l’idéologie. Un cas probant, celui de Voltaire très loué encore de nos jours, pour son ostentatoire prétendu « humanisme » dont la prolixité cinglante, n’empêcha guère le plus grotesque des racismes verbaux, ni même le plus ignoble crime ethniciste contre l’humanité par la participation à l’esclavagisme de ce vénal armateur de négrier! Un humanisme factice que certains cuistres et farauds excentriques osent, éhontés, encore brandir et saluer de nos jours! Comme pour louer la plus immonde avarice, la plus dédaignable, la plus inhumaine vénalité! Une altérité qui assigne l’autre à la souffrance où son bourreau se sent idéologiquement autorisé par son essence supérieure de par son appartenance sociale et civilisationnelle, à assouvir violemment son orgueil et son égoïsme oppressifs aux dépens de l’autre. C’est là, la petite dissemblance de la barbarie d’avec la méchanceté qui, elle, est simplement l’ignoble posture de mauvaiseté de l’homme envers l’homme, se manifestant par l’infliction haineuse d’afflictions objectives à l’humain, sans justification idéologique. Le barbare porte donc une apologie argumentaire sinon directement civilisationnelle, à tout le moins identitaire de la méchanceté assénée à l’autre désigné absolument autre et indigne de justice, car sans parité proprement humaine, donc méritant par essence le traitement afflictif et punitif de son altérité indigne. Là, nous baignons dans ce que j’appelle ailleurs, l’essentialisme idéologique, ce meurtre civilisationnel de l’essence ontologique une et espécielle!
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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