Par Camille Loty Malebranche
L’imaginaire entretient avec les sentiments qui vont déterminer le comportement humain, une interaction permanente par la représentation. L’on sait que c’est dans la représentation du monde où nos affects et nos sentiments qui en découlent en partie, tous deux imprégnés par l’imaginaire culturel dans lequel nous évoluons, que se forment comme en un creuset les herméneutiques particulières situationnelles déterminant notre jugement et notre agir.
La totalité et le partiel, l’éternité et le temps, la clarté et le caché, la vérité et l’erreur, le fini et l’infini, le relatif et l’absolu..., ces envergures cosmologiques et dialectiques du fait d’être qui deviennent étantitaires de l’humain dans le penser et l’agir, sont tous structurés mentalement à travers le prisme de l’imaginaire culturel pour ensuite, connaître l’intervention individuelle de chaque conscience humaine. Ainsi, si le monde va mal, il faut pourfendre ce mal en établissant une étiologie culturelle, un diagnostic des tares et pathologies des imaginaires que sont les cultures et les civilisations.
La civilisation dominante actuelle devra arriver à forger une dialectique nouvelle et ludique qui tissera un nouveau système contre celui qui prévaut en changeant les failles de l’imaginaire social tout en gardant les parties saines. Si nous prenons par exemple, l’occident contemporain, il lui lui faut trouver un imaginaire sain servant de principe de correspondance saine avec autrui. Libération mentale de l’occidental-type, matérialiste grossier grotesque et prédateur impérialiste, aveuglément avide des biens planétaires accaparés et accumulés, pathologiquement esclave compulsif de ses richesses rendues nocives par le rapport idolâtre que ladite civilisation entretient avec elles au point qu’elles sont devenues pathogènes et obsessives. L’on comprend la mort de Dieu dans le contexte avaricieux de ces soi-disant maîtres du monde qui, constamment se cachent derrière le mythe essentialiste de la "race ou de la classe" naturellement "supérieure" pour diriger, dominer et tyranniser le monde. (Sujet plus que jamais à l’ordre du jour, car aujourd’hui encore, des intellos-types mégalomanes du racisme, osent, les uns, justifier les conquêtes exterminatrices du toxique, monstrueux expansionnisme des empires et les autres, plus sordidement impudents, louer les bienfaits du colonialisme).
Vouloir écraser en maître, c’est déjà être malade et dénaturé par la frilosité d’une supériorité inconfortable que l’on sait factice. La liberté ne souffre pas d’être convertie en pouvoir de tyrannie qui dispose d’autrui. La liberté ne peut être que le pouvoir d’être souverain sans détruire la souveraineté de l’autre. C’est donc plutôt une souveraineté avec et solidaire qu’une souveraineté contre et au-dessus. Une souveraineté qui reconnaît plutôt qu’une souveraineté qui agresse ou efface. Une Pensée-Mère, Idée-Motrice qui fait échec à la mort et la déchéance programmée! Contre l’éducation qui magnifie la conquête et héroïse le conquérant, magnifions la libération, l’humanisme et héroïsons les combattants de la justice sociale, les conquérants de la liberté.
Renaître à soi en se remodelant selon une nouvelle axiologie globale de la société, se régénérer par les valeurs proprement humaines et donc toujours supramatérielles parce que privilégiant l’être sur l’avoir, l’humain sur le bestial agresseur, voilà les semences et prémices à un imaginaire libéré.
Le possible est à la portée de cette génération, il n'attend que la libération des consciences pour rafraîchir le monde de l'onde nouvelle qui fera de la longue page ténébreuse de l'histoire où prévaut l'effacement de l'homme par l'homme, un palimpseste où, mieux que sur un seing virginal, se rédigera le chant lumineux d'une humanité rendue consciences vives et libérées sur la ruine des ombres qui circulent, gesticulent avec la vénalité compulsive pour bannière et la barbarie de la cupidité insatiable pour effigie.
L’imaginaire comme champ des représentations doit être réformé par une éducation humanisante afin de changer les perceptions des essences et la conception de soi et du monde que lesdites perceptions déterminent jusque dans les moindres comportements et réflexes. Un imaginaire refaçonné sur la perception de l’autre comme cible de bonté et d’équité sera un pas essentiel vers un monde plus digne, plus vivable et plus humain.
La plupart des maux sévissant comme réflexes collectifs ont été produits par la programmation de l’imaginaire à travers les représentations orchestrées par les grands creusets anthropologiques que sont les institutions culturelles qui façonnent le mental. La voie de la libération de l’homme ne peut s’opérer que par l’apport d’un nouvel imaginaire pour réformer la weltanschauung aliénante et pathologique qui déshumanise. Un imaginaire imprégné des grandes vérités transcendantes appelant l’homme vers les sommets spirituels, intellectuels et moraux pour y prendre racine et de là refonder l’idéal au-dessus des platitudes matérialistes, serait une voie d’humanisation forte contre les vices déshumanisants de la civilisation qui sévissent aujourd’hui contre l’espèce. La vie et ses faits sont comme inscrits dans un imaginaire préorchestrant par delà les libertés des choix particuliers et situationnels collectifs ou individuels, le cadre de l’action par la représentation et la projection de soi des consciences qu’imprègne l’imaginaire.
Dans les sociétés, l’imaginaire est une sorte de verger des idées qui régissent la culture dans la praxis collective. Au stade individuel, l’imaginaire moulé dans les représentations idiosyncratiques de l’individu, est en creux le canevas mental de l’autodétermination de l’agir, du comportement, du sens de l’action et de la fin projetée par l’homme. L’imaginaire est en quelque sorte un espace de préconditionnement des hommes par ses suggestions pré-idéelles, même si, il y a toujours la part majeure des choix personnels des hommes qui les rend jugeables, responsables de l’action… Toutefois, si au stade personnel, la destinée métaphysique est conquise ou perdue par le niveau spirituel ou non spirituel des consciences, au niveau social, la puissance de l’imaginaire comme fonction mythologique proto-active dans l’action collective culturelle et institutionnelle, est carrément une dominante prélogique sur la logique et la rationalité sociale. Ainsi, les élites saines de toute société ou civilisation, conscientes des tares de l’habitus collectif, n’ont qu’à se mettre ensemble et s’entendre pour transgresser la logique malsaine du statu quo, en travaillant harmonieusement à élaborer un ordre humain des choses et à jeter les bases radicales d’un nouvel imaginaire humanisant!
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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