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Par Camille Loty Malebranche

 

L’homme se manifeste par l’action, on le sait, mais on oublie souvent que cette posture du sujet qui n’est jamais neutralité, s’exprime soit souverainement soit amorphement selon les niveaux de conscience. Pour ainsi dire, l’être humain se présente inéluctablement à travers l’action choisie orientée dans les actes qu’il pose comme conscience affirmée ou conscience mollasse inexpressive. L’homme se donne à voir comme sujet assumé ou comme simple reflet, indigne de sa subjectalité. Vaut mieux être accusé d’avoir trop agi que d’être reproché d’amorphisme par torpeur. L’abnégation en certaines circonstances - abnégation qui n’est jamais inaction - est un mode d’expression qui doit être bien pesé comme une intervention bien conçue, sinon elle court à l’amorphisme qui ensuite, dégénère en torpeur.
 

La torpeur est toujours coupable puisque non seulement elle n’agit pas mais ne se donne même pas le temps de réagir. C’est de la passivité comme consentement du statu quo. Il y a deux manières d’appui d’un statu quo: l’activité comme contribution et la passivité comme acceptation. Et, si comme nous l’avons toujours dit, l’homme réagit beaucoup plus qu’il n’agisse dans un monde où l’action sociale, la précession de la structure conditionne l’individu, il est néanmoins fondamental que la réaction pertinente de l’individu devienne peu-à-peu de l’action qui lui aménage l’espace de sa liberté, où il devient personne par l’affirmation singulière de soi tout en restant agent sociétal.

 

L’amorphisme est l’ironie de l’action sans vraie activité qui laisse faire et se prétend lâchement neutre à travers des actes d’insignifiance de répétition systémique programmée. L’amorphe est un collaborateur inassumé des acteurs du statu quo qui, eux, s’érigent agents de la marche des choses, ce faire collectif en cours qu’est la vie sociopolitique! Lamorphe est un patient coresponsable avec tous ces dits agents de l’ordre des choses, complice par couardise de leurs forfaits.

 

Hélas! La canaille active, en foule, avec les catégories d’engeances qui la composent, envahit l’échiquier des institutions du pouvoir, et les valeurs humaines sont désormais exclues pour l’exhibition de cuistres crapules faisant leurs niques et leurs simulacres!

 

Il y a une élite rarissime de proactifs autodéfinis au vouloir fort, qui constituent la minorité des esprits refusant d’être définis par la grande matrice systémique tendant à faire de l’homme un rouage passif de lordre malsain et injuste qui a cours. Les rouages, il faut le dire, sont soit anonymes soit célèbres dans le ludique fonctionnel de la société de l’automation. Un chef de gouvernement comme bien d’autres gesticulateurs de l’actualité médiatisée, font souvent allègrement partie des automates chéris par le système! Et il n’y a pas vraiment une différence entre le caissier anonyme d’un magasin qui s’identifierait seulement à ce qu’il fait et le palatin figuratif, ces bonhommes cravatés de palais et à limousine que le système paie grassement pour faire le chef au nom de l’establishment. L’un et l’autre sont dans la mécanique automatique de leur rôle. Des actants amorphes mais pas des agissants! Un premier ministre et un caissier machin répètent des gestes, et si leur vie n’est que cette répétition qu’ils ne dépassent pas en imprimant une vraie vision propre, ce ne sont que des pièces qui répètent une fonction. Vulgaires actants insignifiants par leur amorphisme! L’homme amorphe est un actant qui ne prend pas le temps d’agir soit par lâcheté, soit par opportunisme, soit par sottise. Un actant sans volition, sans révolte et sans distanciation : une manière d’acteur non agissant, patient volontaire de toutes les assimilations du mode de vie social.

 

L’amorphisme n’est ni sagesse ni intelligence mais blêmissement, inaptitude à s’affirmer par incapacité de se mettre en scène dans l’action vraie et choisie pour déterminer son rôle et ses prises de position dans le drame permanent des hommes et des choses que constituent la vie sociale et la vie humaine elle-même vu les exigences ininterrompues de choisir et donc de s’affirmer.

 

L’homme d’action est nécessairement proactif, car il ose dépasser la simple fonction pour vivre selon une dimension de sujet plénier. C’est l’homme qu’aucun rôle ne définit et qui ne se définit pas selon les places que la société propose voire impose. C’est l’homme qui se sait Sujet suprême après Dieu, et qui s’autodéfinit en dehors des dévolus sociétaux institutionnels comme être de pensée et d’action transcendant radical avant la foule institutionnelle des structures et l’environnement souvent débilitant des individus-fonctions dans l’univers artificiel des choses.

 

L’action étant attribut et voie inhérente à l’existence humaine, il est donc un impératif pour tout homme assumant son humanité par soi, d’être proactif, d’agir par soi et selon soi sans attendre, sans être par procuration.

 

La vie doit être la saison de l’action pour et par le sujet humain, sinon c’est la dégénérescence en sujet annihilé et utilisé de ses dominateurs qui le chosifient en usant comme un vulgaire objet.

 

Dans une société à propension dévorante de la subjectalité pour faire de tout sujet humain une simple fonction sociale, un objet systémique donc, société que je dirais de « coproïsation » vu la tendance de l’institution sociale à établir une idéologie d’insanités matérialistes pour débiliter les esprits et faire de tous des sous-produits à travers toutes sortes de déchets magnifiés - la dignité humaine ne peut se maintenir que par une résistance et une détermination tant cogitante qu’active faisant face à toutes les faussetés et manipulations.

 

L’actant, le poseur d’acte, est soit un agissant actif éveillé et conscient donc un vrai protagoniste de l’action, soit un amorphe en conscience malgré ses actes qui donnent l’impression d’activité. L’agissant comme actant vraiment actif et éveillé, agit dans des actes pensés tout en prenant constamment le recul conscient et pensant pour juger, corriger ou peaufiner sa voie vers les buts à atteindre. Même son abnégation n’est pas amorphe puisqu’elle porte toujours du sens contre les non-sens ambiants.

 

L’agissant éveillé est un homme manifestant la justesse dans son action bien projetée, c’est pourquoi, il sait s’améliorer, se dépasser lui-même et repenser tel acte indigne de sa propre vision d’action, de son propre agir. Ici, la justesse et la justice sont une paire d’adéquation de l’agir et doivent être poursuivies dans chaque acte surtout ceux qui impliquent autrui car une justice voulue comme moralité de l’action est vaine si l’agissant ne juge avec justesse le niveau de réceptivité de l’autre qui peut, s’il n’en est pas encore apte, en faire une catastrophe. C’est comme un parent qui donnerait une arme à feu à un enfant pour qu’il se défende de camarades indignes le harcelant à l’école!

 

Chez l’agissant éclairé et pleinement décideur, la justesse est complétive de la justice pour que l’action soit sagesse!... Là, la critique factuelle du hic et du nunc et la pertinence logique et morale du choix volontaire en situation, sont la dernière pierre de touche, la juste mesure appliquée permettant cette justesse dans la justice du sage s’assumant!

 

Enfin, l’agissant conscient est ferme et doit constamment veiller à manifester de la fermeté. Car un agir sans fermeté qui accepte le point de vue délétère d’autrui et ne le renvoie pas sans appel dès le départ, est souvent de l’amenuisement de soi face à la canaille dominatrice, un auto-asservissement par faiblesse de caractère voire couardise dans des circonstances où l’autre, méchant et agressant sans le paraître, veut se grandir insidieusement aux dépens du complaisant en face de lui. Un complaisant le plus souvent bien supérieur à ladite canaille qu’il laisse gagner par mollesse! Que de minables, par insultes et aberrations convenues voire populaires, ont fait subir des affronts à d’illustres esprits complaisants et faibles en caractère qui ne savent pas se défendre pour renvoyer ces minables honteux à leur misérabilisme! Là, vaut mieux mille fois une renommée de dur que de faiblard! Comme ces hommes niais que dominent tyranniquement leurs femmes batteuses d’homme, parce qu’ils ont intériorisé un complexe de culpabilité pour les siècles où des hommes maltraitaient les femmes! Depuis quand la justice voulait dire qu’il fallait changer le mal et ses ignominies de camp pour être juste! J’appuie tout combat d’équité mais quand la soi disant lutte à l’injustice devient besoin morbide de vengeance et sordide quête de pouvoir de domination, je me rebelle et contre-attaque sans complaisance! L’acte juste, l’action de la justice doit toujours libérer tous sans devenir écrasement de quiconque par une quelconque cristallisation d’une conscience de culpabilité qu’entretient à dessein la posture victimiste de monstres en mal de pouvoir.

 

La fermeté est aussi notre gage de victoire sur nos propres pulsions mauvaises. Un homme qui refuse de participer à une orgie pour juste cause de moralité doit tout simplement éviter de s’y porter spectateur pour ne pas être tenté au-dessus de ses forces! Il ne faut jamais oublier que nos pulsions sont nos faiblesses, une fois hors contrôle; et, si vous me permettez d’en énoncer une maxime en terme de paradoxe sous forme d’oxymore, je vous dirais qu’il ne faille jamais sous-estimer la puissance ravageuse de nos faiblesses!

 

Dans la perspective de l’action qui est un attribut fondamental de l’être de conscience supérieure qu’est l’homme, disons que tout humain est un agissant-actant vu que sa conception et son comportement global constituant son action se décline en actes situationnels. Ainsi, chaque acte non conforme à notre perspective de sujet souverain et finaliste par notre projection de nous-mêmes qui s’y fait, est signe d’une petite faille, d’un manque qui nous alerte sur une inaptitude que nous sommes appelés à dépasser par un effort et une discipline adéquate. L’acte indigne, comme tous les agissants de valeur, tous les hommes de mérite en commettent d’ailleurs sur leur chemin de sujets perfectibles, est la révélation à la personne humaine en action, d’une faiblesse sur quoi travailler, d’une brèche à colmater. C’est ce travail de perfectibilité qui fait de toute vie d’homme un champ de défis au niveau de son être, défis à travers quoi s’expriment la fermeté, la souveraineté, l’exigence selon le sens et la justice, défis où se manifestent le mérite ou le démérite, défis où s’affirme soit la gloire finalitaire de l’agissant authentique soit l’amorphisme lâche, la négation de soi par abandon à des petitesses.

 

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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