Individuation et Personnation.

14 Juillet 2023

Par Camille Loty Malebranche

L’individu, par delà sa qualité d’unicité dans l’espèce et d’altérité radicale où il est l’autre de tous semblables et différents, est une finité stricte absolue car non prolongeable en tant qu’être unique par essence. La personne, c’est l’édifice de l’accomplissement transcendant que l’individu en tant que sujet conscient de sa vérité d’humain, se construit comme étant à la fois ancré dans le temporel tangible et projeté dans l’entéléchie eschatologique, cette téléologie du soi visant son être, son destin unique particulier au coeur de la destinée immatérielle de l’espèce, destinée espécielle, d’ailleurs si souvent oubliée, délaissée par l’humanité.

L’humain et le devenir.

À l’échelle anthropologique, l’homme est présence individuée par la nature comme tout membre des espèces vivantes mais à la différence et au-delà de tous les êtres vivants, l’homme incarne l’unique être qui devient vu sa faculté d’autodétermination et sa propension à se construire en transcendant l’organique. L’homme est le seul être se manifestant conscience supérieure qui aspire au dépassement. Le devenir est un apanage de la conscience supérieure qui se projette vers un accomplissement. L’animal n’a que l’avenir c’est-à-dire le futur biologiquement programmé. L’homme, lui et lui seul, est téléologique, ayant un devenir pour soi qu’il vise et tend à réaliser dans son avenir maîtrisé par des projets existentiels. Un dépassement fondamental, car nul humain ne se réduit au simple organisme individué! C’est pourquoi toute tendance idéelle à faire primer l’organique sur le spirituel orchestre la déchéance, l’autofreinage où l’individu renonce aux hauteurs de personne humaine qui l’humaniseraient pleinement… Ainsi, l’individu humain est-il le terreau, la base de toutes les projections et de tous les projets, condensé de toutes les forces qui détermineront le devenir ascensionnel ou déshumanisé, terre des germes et semences de l’homme digne ou déchu de son essence. L’individuation, s’il faut ici le rappeler, est la spéciation naturelle génétique donc préhumaine effectuée par l’ontogenèse.

La personnation, cette construction de soi en personne par le sujet conscient de soi et se projetant vers son accomplissement, fait figure, quant à elle, de l’ascension de soi de l’individu humain vers sa plénitude. C’est donc une sorte de spéciation au-dessus du génétique car pleinement et strictement humaine au-delà du somatique, par le fait même de l’humanisation qu’elle poursuit. Humanisation, construction du sujet affirmant son humanité et se projetant donc très au-dessus, absolument au-delà de l’hominisation phylogénétique. C’est pourquoi, l’homme est le seul organisme animal qui dépasse l’animalité. C’est aussi pourquoi l’actuelle tendance de la canaille médiatisée, soi disant intellectuelle, qui proclame le terre à terre au nom d’un libertarisme délirant, n’est qu’un sous-produit de la pseudo-individuation idéologique de l’homme, individuation abortive, vacuité déshumanisante qu’imprime aux humains, le matérialisme grotesque de la société de tous les vides aujourd’hui en vogue dans l’idéologie dominante!

Pour revenir à la personnation authentique, la nature organique n’y est pour rien, seuls les attributs supérieurs de l’espèce confèrent à chacun de ses spécimens, cette tendance téléologique vers l’humain au-delà de l’organique, cet organique auquel des dégénérés de l’hédonisme primaire, voudraient soumettre l’être humain réduit sans autres horizons. Par ailleurs, force est de souligner que c’est précisément la faculté téléologique, ce besoin de transcendance du somatique qui fait de l’homme une indéfinition, une énigme supra-organique pour toute science discursive.

L’individu comme condition immédiate est constamment en course passive ou active, consciente ou inconsciente de son devenir. La pensée-action de l’esprit comme coureur conquérant de soi ou errant vers des vétilles, reste le déterminant supérieur soit du devenir en sujet souverain et personne humaine selon l’amélioration permanente soit de la déviance de l’individu en ombre gesticulante des illusions et vanités abyssales du monde.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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