Par Camille Loty Malebranche
Le jugement interpersonnel est sans doute le plus important paramètre des rapports humains car il s’agit précisément pour l’homme, individu social, d’être accepté, apprécié ou au contraire d’être stigmatisé voire rejeté. C’est une entreprise lourde de conséquence dans les relations humaines, car terriblement pesante dans la balance de l’estime de soi des individus et des collectivités. Je vois aussi le cas du jugement de cour où l’individu introjecte puis régurgite le ressassement grégaire pour ou contre son semblable ainsi loué ou haï essentialistement par préadhésion au courant auquel appartient le juge.
Le jugement de cour qui préjuge de façon soit hagiographique soit diabolisante, devient, quand il condamne, de la stigmatisation par préjugé, car entièrement infondé, fondu dans la non vérification de son accusation érigée en verdict. Quand il y a contemporanéité du jugement et du verdict, on est en présence du préjugé et de la discrimination favorable ou destructrice, de toute manière, corruptrice de la nature du jugement juste qui est par essence, quête de vérité et d’équité mise en acte par la conscience de l’homme.
Le pire jugement, parce que mesquinement téméraire car haineux et commandé par les lorgnettes du ressentiment, des préjugés et de la lubie selon les perceptions les plus insensées, est celui que l’on porte sur la personne interpellée plutôt que sur le sens et l’orientation axiologique de son comportement. Je considère ici la personne humaine aux prises avec le jugement téméraire et scélératement irrationnel de prétendus autres humains se défoulant de leur propre insanité aux dépens de leurs semblables faits cibles voire boucs émissaires, à coups de glaviots dont les postillons sont aussi sales, aussi mortels que du venin. Si même au tribunal où le jugement formel de l’État se veut strictement celui des faits, les déviances et dénégations de l’équité de certaines sentences judiciaires frappent des individus, groupes ou institutions stigmatisées par l’imaginaire collectif selon la clameur idéologique et les stéréotypes, alors, imaginons l’espace individuel des jugements où les humains opèrent sans contrainte, comme bon semble à leur aigreur, en jeteurs de sort!?
La terreur du jeteur de sort qui frappe ses détestés, n’a de limite que la subjectivité toxique du juge et l’étendue de la méchanceté des individus et des foules qui jugent en jetant lesdits sorts. Et nous savons que la méchanceté, surtout dans sa face molle, combien exterminatrice qu’est la partialité où le parti pris se charge d’anéantir tous les justes dus et droits d’autrui, est, hélas, la bannière macabre de la plupart des jugements d’autrui! Juger est un acte fortement impliquant dans notre rapport à autrui. Car il détermine notre comportement et notre traitement de cet autrui. Juger, c’est créer un univers de présentation du sujet jugé selon la représentation du profil de ce sujet, cet humain jugé, telle que faite par la conscience du juge qui le représente, le présente à la considération de tous.
Bien juger, juger juste le prochain, tel que nous voulons l’être, c’est en quelque sorte se dépouiller de toutes idées fabriquées par le ressentiment ou la représentation de groupe ou de clan sur l’homme à juger pour ne regarder qu’à ses valeurs exprimées dans son agir, ne scruter que la factualité de son comportement, le seul qui doit être interpellé, appelé à sa vérité à mettre en pleine lumière c'est-à-dire loin de la lubie des individus ou groupes qui prononcent des jugements de haine ou d’idolâtrie.
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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