Par Camille Loty Malebranche
L’Infini
L’infini est soit pur soit relatif, loin des querelles suscitées par le vocable en physique et en philosophie où il fut adjectivé « actuel » ou « potentiel » depuis au moins Aristote qui refusait à raison, une existence physique audit infini tout en lui reconnaissant une possibilité mathématique qui le verrait en tant que potentiel, c’est-à-dire à travers la possible croissance illimitée des grandeurs.
L’infini pur - catégorie de l’introuvable dans la factualité du monde - est au plan spécifique de la substance perçue quantitativement comme Totalité. J’entrevois donc l’infini non comme théorème ou axiome mathématique, mais comme essence et modalité mystérieuse de l’Être, en tant qu’il constitue l’envergure ontologique immanente à l’essence d’un Être. Envergure indiscursive qui échappe au schème des études humaines. De fait, l’infini est le champ exclusif de Dieu, car il réfère à l’absence de bornes et donc à l’étendue absolue, sans limites de l’Être Total de Dieu, auquel seul il peut s’appliquer. Dieu est l’Être de la plénitude, plénitude ontologique, Totalité sans limite que nul ne peut nombrer ni mesurer. Dieu est la Quantité-Totalité au-dessus de toute mensuration, de tout comptage et de toute catégorie mesurable imaginable. En dehors de cela, le cosmos où tout ensemble incommensurable parce qu’incernable par la mensuration humaine, constitue une suite de finis formant un grand infini relatif. Constatons par ailleurs, qu’il est dans le fonctionnement courant des humains, une infinité d’infinis relatifs tels : le lexique d’une langue et ses constructions phrastiques; tels aussi les nombres, les ensembles mathématiques, telles en biologie, les cellules de l’organisme… Quant au cosmos - terme plus précis que celui d’univers, vu que l’étendue cosmique est de type multiversel, renvoyant à des univers multiples, avec sa stature inaccessible à nos entendements - il n’est dit infini pur que pour son immensité considérée par allégorie allusive à l’unique infini pur qu’est Dieu et Dieu seul.
L’Absolu
L’absolu tient avant tout d’un mode de perception métaphysique séant au domaine théologique voire mystique où il revêt le caractère exclusivement qualitatif d’un être et peut être autant laudatif que péjoratif. Par exemple, Dieu est absolument Bon tandis que le Malin est absolument méchant. En ce contexte nécessairement extrême sans être manichéen - le manichéisme ne pouvant être que du ressort du jugement humain porté sur des humains - nous sommes amenés à déceler que tout absolument méchant et mauvais qu’il soit, satan, l’abominable déchu des abîmes, n’est guère parfait dans le mal car la perfection dans le mal ne se pourrait que si ce repaire de toutes les salissures et méchancetés, avait aussi tout pouvoir, sans aucun Supérieur pouvant l’arrêter, lui, dont la mauvaiseté est pourtant absolue… Ainsi, pour être parfait, un être doit en plus de son absoluité dans sa quiddité qualitative, disposer du pouvoir infini, total, d’imposer ce qui est absolu en lui.
La Perfection
Être parfait signifie pour un être, qu’il totalise le quantitatif de la Totalité et le qualitatif de l’Absoluité selon une étendue ontologique et un pouvoir suprême de manifester son essence, pouvoir que rien ne peut ni endiguer ni le moindrement limiter. À ce compte, le 666 de la bête de l’apocalypse, ce symbole du Malin échouant trois fois à atteindre le 7 - ce chiffre emblématique de la Totalité Parfaite - nous donne à voir clairement la différence entre absoluité et perfection. En effet, le 666 de la bête abominable évoque sa posture de manque qui la rend littéralement minable, car sans pouvoir suprême. Le 666 désigne précisément le parfaitement imparfait selon la numérologie sacrée qui le voit comme l’impuissant incapable d’atteindre le 7 du Parfait de l’Être Créateur trinitaire auquel s’ajoute le 4 de la Création qu’est le cosmos représenté comme contenu dans la quadrature figurée par les points cardinaux (nord, sud, est, ouest). Ainsi que le précisent certains théologiens exégètes comme les moines de Maredsous, le 666 incarne l’allusivité heureuse de l’imperfection fatale du Malin originel quant au pouvoir de faire mal et d’infliger son effroyable malignité.
Le Parfait est donc exclusivement Divin parce qu’évoquant strictement le Suprême Total de l’Infini empli de toutes les qualités de l’Absolu. Le Parfait, c’est la Complétude ontologique à qui ne manque rien. Nul être ni étant, hors Dieu, ne connaît donc cet attribut d’essence qu’est la Perfection; car fors Dieu, tout être ou étant est incomplet, tout est quelque part, manque. Néanmoins, malgré son incomplétude, la créature spirituelle, l’esprit digne de son essence - étant tiré de l’Être Divin, selon la kénose génitrice de Dieu qui a conçu l’esprit à son image quoique limité parce que de même substance mais pas de même envergure que Dieu - doit toujours prétendre à la Perfection comme point de mire pour la croissance en sa nature, en son être…
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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