Par Camille Loty Malebranche
Dans un monde, où la structure efface l’homme-personne pour l’homme-fonction, l’homme-rouage et condamne l’humanité à la figuration comme une figure fossile de l’institution sociale qui - par effet kitsch du langage - ose encore s'adjectiver avec le prédicat « humaine » en se nommant impudemment « société humaine », seule une réévaluation du rôle du citoyen dans les sociétés modernes peut redonner un sens à la citoyenneté.
Alors que les pilules du droit prétendent enrayer les dommages de l’injustice, l’inégalité, on oublie souvent que le droit lui-même est reflet des inégalités sociales et internationales et des servitudes et restrictions des libertés qui s’en suivent. Et dire que le droit aurait dû rendre la société et le monde plus libre par son règne qui parerait aux inégalités par la force de la loi et de son application gracieuse ou coercitive! Camus avait raison de nous mettre en garde, en nous rappelant que « l’époque romaine fut à la fois celle de la plus grande science du droit mais aussi celle de la plus terrible dictature ». Car justement l’homme n’a pas encore assez évolué pour s’entendre gracieusement et équitablement sur ses conflits, et la force publique à l’intérieur des sociétés comme entre les États (car le conseil de sécurité de l’Onu avec ses sanctions économiques et militaires en est vraiment une à l’échelle planétaire) ne frappe que les petits. Pas de sanction contre le bellicisme tragique des responsables des puissances mondiales ni contre la pollution des puissances industrielles, ni contre les armes à destruction massive des pays riches, ni contre les propagations de maladie comme le sida qui vient de négligence de savants occidentaux ayant utilisé sans précaution des cellules sanguines de singes dans la vaccination antipolio… L’hécatombe planétaire vient des grandes puissances de même que le risque de destruction de l’espèce, pourtant elles sont juges au nom du droit international! Aujourd’hui, l’international nous met en présence des pires discriminations entre États.
Il existe de toute évidence, une force du privilège qui fait loi et prime tout droit, et qui prouve l’inégalité de droit des États. Le soi-disant débat du nucléaire en est encore une fois probant. Mais aussi le refus de restitution des richesses volées de la part des pays prédateurs enrichis par les crimes contre l’humanité de l’esclavagisme et du colonialisme, qui se complaisent en profiteurs éhontés de voir leurs victimes appauvries de génération en génération, mourir de faim tout en les accusant de gabegie, les traitant en bons à rien! Sociodicée facile pour ceux qui jouissent des fruits de la main basse de leurs pères sur la fortune des ancêtres des pays pauvres d’aujourd’hui. Hélas! avec l’agressivité aliénée de la racaille, la gangue des « sots savants » que l’on rencontre partout où l’occident leur donne la parole ou l’autorisation académique de parler, les « sots savants » venus des pays quasi détruits et mal famés, gobent et préconisent l’idéologie criminelle du Nord, par complexe d’infériorité et délire d’intégration lors même où ils sont des assimilés venant de ces pays saignants et hémorragiques! Un peu comme tous ces génocidaires et tyrans du Sud qui ont miné leur propre pays en infligeant à leur peuple les politiques à la papa doc ou à la rwandaise génocidaire. Avec la canaille autorisée et alliée aux démons de l’asservissement politico-économique contre leurs propres congénères, la libération des ostracisés du monde et les rêves de liberté voire d’amélioration du sort des majorités, risquent de piétiner longtemps dans la marge miséreuse de la politique Nord-Sud!
Pour revenir au nucléaire, très médiatisé avec les cas des essais de missiles de la Corée du nord et celui de l’enrichissement de l’'uranium par l’Iran, posons la question : veut-on dénucléariser le monde? Certainement non. Juste qu’un quarteron d’États asservissant des organismes mondiaux en en faisant leurs destriers idéologiques et autoproclamés « communauté internationale » s’octroient le droit délétère de posséder les armes de destruction massive alors que le reste doit s’en priver. En fait, on aborde mal la question de l’égalité comme corollaire de la liberté car l’égalité est une histoire que l’humanisme idéal se raconte à lui-même. Et Dieu seul sait combien il est facile de manipuler les peuples, de les aliéner même par des demi-vérités, des logiques tronquées aux raisonnements fallacieux! C’est de l’équité qu’il faut dans les rapports humains et interétatiques. L’équité sait que l’autre est différent et peut-être défavorisé par la nature ou l’histoire, elle se contente, sans juger de la condition de supériorité ou d’infériorité objective de l’autre, de le respecter et lui rendre justice. La justice. Principe de toute liberté, est l’essence même de l’équité, l’ennemi juré du droit officiel avec ses ruses et ses bluffs!
SUBVERSION DU CHOIX OU ABSENCE D’OPTIONS
L’incandescence de la passion rend le lien plus doux que l’immédiate, la fulminante liberté. Au-delà de l’amour interpersonnel, qui fait renoncer l’amoureux à une part de sa liberté, la dignité de l’être humain ne souffre pas de voir limiter sa liberté de conscience, de pensée et d’action en tant que mode de son déploiement existentiel. L’homme a toujours fait de la liberté une question de dignité dont la valeur supplante celle de la vie et pourtant en même temps, ses amours lui ont toujours paru une force supérieure à cette force nourricière des plus grandes révolutions. Vouloir que tout soit sous contrôle autant que possible, est légitime mais le possible de l’homme est tellement limité par l’ici et le maintenant et tellement contingenté par la structure sociale! L’homme garde, toutefois, toujours le pouvoir de ne pas patauger dans la servilité de la propagande sociale, la sociodicée, ce discours autolaudatif de l’idéologie dominante qui accuse tous les retors et inadaptés à ses monstruosités, de crime et de rébellion…; discours insidieux où les maîtres des biens s’autoproclament de manière inavouée, maîtres des vies et des hommes. C'est aux peuples de se défaire des systèmes liberticides en souverains en s'organisant de manière collective loin des délires d'égoïsme de classe et d'individus séquestrant le pouvoir. L'homme n'a pas à obéir à des hommes mais à des principes justes dans leur fondement. Seule la sphère de la transcendance fait exception à cette règle: d’un point de vue métaphysique, en effet, le déterminisme suprahumain nous conduit à croire que la seule liberté de l’homme est le choix de son maître : Dieu ou l’absurde. Mais dans la vie quotidienne où végète l’écrasante majorité de l’espèce, l’émergence de la personne émancipée des chaînes du social, reste utopique. Comme un personnage pirandellien, le drame de l’humanité libérée attend désespérément ses auteurs et metteurs en scène. Le manque de culture dans un milieu où le loisir abêtissant s’est substitué aux vraies questions de société en envahissant et en altérant l’espace public, finit par asséner sinon son coup de grâce, tout au moins une frappe assommante à l’esprit de notre temps qu’il corrompt.
CAMILLE LOTY MALEBRANCHE
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