L’authentique Devenir, force active vers l’entéléchie plénière.

Par Camille Loty Malebranche

Devenir exige d’abord de se connaître et identifier sa nature, car seule un assumateur de la vérité de son ipséité, peut prétendre évoluer vers l’accomplissement de son essence. Il n’y a pas de devenir pour quiconque ne sait qui il est. L’étrangeté dans l’être, ce mal dissociatif de l’esprit, tare métaphysique grave, est aliénation de sa victime rendue dès lors littéralement insensé et désorienté. La puissance de l’être à l’échelle humaine, est qu’il porte en soi un laboratoire de possibles qui interpellent la conscience vers le devenir à choisir.

Pour l’humain, devenir signifie précisément intervenir pour orienter les potentialités ontologiques et rendre effectifs les possibles à canaliser et assumer vers des fins désignées. Devenir, vraiment, exclut la pauvreté mentale et la misère conscientielle du suiviste qui fait tout par procuration sans dignité ontologique de l’esprit qu’il est. Ceux qui se vautrent dans la platitude, ceux qui pataugent dans la vilenie des baragouins et piétinent dans la vulgarité des prêts à penser et des réactions sur mesure, ne deviennent pas, ils ne font que laisser exister l’être dans le figement simulateur des ombres simiesques qui imitent répètent sans jamais s’affirmer.  

Lésiner sur la foi en la nature spirituelle de son humanité, c’est chambarder la seule puissance de victoire sur les néants multiples du sensible et des apparences qui nous entourent et tentent constamment de capturer notre être en séquestrant notre attention, notre conscience. Douter du soi spirituel qui est à l’image de Dieu c’est miner son être par une sorte d’autodévoration selon le défaitisme de la pensée déviée, autodestructrice. Manquer de confiance en l’Amour divin, c’est émietter le pouvoir suprême qui nous est donné pour vaincre en ce monde où précisément le principal mal est le refus du véritable Amour qui est spirituel. Le devenir authentique est égrugé, réduit en rogatons chaque fois que priment les illusions du sensible et les impressions lugubres qu’elles impliquent en la conscience humaine.

Je ne dirai pas comme Hegel que « devenir vaut mieux qu’exister », mais que le devenir, cette voie inhérente à l’exister, est à l’échelle du niveau de conscience de l’homme définissant et assignant finalité à son être.

Déjà au sens temporel, devenir renvoie à la prospective, la capacité de maintenir le cap et la fermeté téléologique vers la fin visée. Ainsi, il n’y a pas de devenir souverain pour l’esclave qui abandonne ce qu’il est, au profit de l’autrui qui le vampirise et dont il vit par procuration, la voie étrangère. L’esclavage mental des multitudes, est aliénation ontologique avant d’être aliénation sociale, gestes préprogrammés par quelques meneurs prédateurs.

Au temporel ordinaire comme au spirituel, quand le devenir est volé, l’être ne peut être que séquestré, fait ombre du voleur de sens qui signifie à sa proie des fins que celle-ci n’a point choisies.

Devenir est l’espace d’évolution dans la dynamique métaphysique qui se soldera par l’aboutissement ou l’échec ontologique de l’homme, esprit incarné et en route.    

L’authentique devenir est force active, irrépressible et invincible contre figements et fatalités, force qui conquiert la destinée de la nature humaine, la véritable fin de la créature humaine à travers les situations singulières que sont les destins individuels.

Si tout étant matériel devient, en tant qu’évolutif sous la férule du temps qui use et efface toute matière - l’esprit, dans sa vocation atemporelle et éternelle - a pour mission de choisir l’être dont la faculté suprême est de se bonifier par l’ancrage en sa vérité et de se renforcer en son essence. L’homme, image de Dieu, doit choisir de devenir l’être de sa déité en Dieu ou mourir parce qu’indigne de sa nature.  

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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Comments

[Eva Logorya]

« Je ne dirai pas comme Hegel que « devenir vaut mieux qu’exister », mais que le devenir, cette voie inhérente à l’exister, est à l’échelle du niveau de conscience de l’homme définissant et assignant finalité à son être. »

Oui, et j’affirme que l’on devient parce que l’on existe.

Le véritable sens de l’existence est le devenir par immersion dans la réalité qui nous entoure, qui a été conçue dès l’origine pour ce but.

L’auto-flagellation, l’incarcération volontaire ou non dans des officines religieuses, et plus généralement le développement de routines existentielles de toutes sortes sont anti-nature dès le départ car elles préviennent l’expérimentation.

Cette aptitude à courir vers le but en vivant pleinement et résolument est effectivement le signe d’une conscience mature assumant son entéléchie.

[CLM.]

Tout à fait. La vraie religion est réponse intérieure à un appel mais jamais formalisme et refus de l'action en ce monde qui n'est que la voie, le tremplin vers l'infini éternel. Ici-bas le destin, c'est la route, la course. Encore faut-il trouver la route et y courir sans l'abandonner! Heureux l'Homo Viator conscient qui sait rencontrer Dieu comme chemin et destinée car un tel homme sait que nulle routine n'est due et que la Foi en Dieu est vibration et renouvellement du soi se projetant, conquête de soi à entreprendre! Ce que le Christ nous révèle en disant "le Royaume de Dieu est en vous". Donc il faut évoluer pour l'atteindre en nous et non ailleurs. Et il y a le stade de la course vers le Royaume de Dieu qui, dans cette vie, est en devenir car non encore atteint. Paradoxe, donc!