Le Royaume de Dieu, ancrage et praxis de la foi.

28 Février 2023

Par Camille Loty Malebranche

Le royaume de Dieu prêché par Jésus, est le rejet de l’imaginaire mondain avec ses représentations faites de perceptions illusoires fixées sur l’extériorité esclave de l’impermanence et du fini. Car le monde et son règne est l’inscription de la finitude dans les méandres de la perception de l’homme dont il ravage l’intériorité. Au sens métaphysique, un homme selon le monde est une conscience vidée de soi au point de renoncer à sa vérité d’esprit incarné.

Le vocable royaume de Dieu est un anthropomorphisme évangélique pour désigner la conformité du mode de vie selon la foi spirituelle en Yahvé, assumée comme fondement existentiel. Le royaume de Dieu est d’abord la vie de l’esprit selon sa nature à l’image et à la ressemblance de Dieu, vie spirituelle inspirée et accomplie par Jésus qui est l’incarnation du nouvel homme libéré des culpabilités d’une loi rigide mécanique et des rites cérémoniels de l’hiératisme vétérotestamentaire. Le royaume de Dieu enseigné à travers le ministère christique de Jésus, proclame que l’homme de foi n’est pas du monde, pas banale chose vivante sortie du minéral évolué mais agent divin, envoyé missionnaire de Dieu dans ce monde d’agueusie, monde désignifié dénaturé en ses crises de sens les plus extrêmes. Crises qui voient l’être humain frappé d’aliénation métaphysique où l’esprit qu’il est, détourné de sa vérité et de sa vocation d’hôte du Père, altère la civilisation comme par inconsciente mise en scène des déviances du rapport à soi et à l’être. L’homme spirituel sait quant à lui, transcender l’absurde et se reconnaît sel de la terre en tant qu’il assume et proclame la destinée spirituelle qui fait de chaque humain ici-bas, un homo viator.

Tant que l’homme nie son essence interne d’esprit, cette hypostase de sa véritable humanité, tant qu’il oublie l’incarnation missionnaire qu’il est, dont la mission fondamentale est de rencontrer Dieu et de vivre spirituellement, sa vie demeurera la projection délétère d’une finitude au regard figé sur l’organique, qui refuse sa destinée éternelle d’esprit. Et, un esprit victime de cette désorientation ne peut que tenter de remplir sa temporalité par toutes sortes d’incohérences. La déroute intérieure du sens est un terreau fécond en toutes sortes d’aberrations et d’horreurs inhumaines. Voilà pourquoi l’histoire, même celle des plus authentiques révolutions, une fois prise au rétiaire de la négation de la spiritualité, négation donc inconsciente de l’homme qui est esprit, a toujours cette odeur âcre, désespérante de l’inachèvement et de l’échec des bons projets et intentions du salut collectif.

Le royaume de Dieu est attention doublement fixée sur Dieu, à la fois comme Rocher du Présent sur qui toute la vie spirituelle du yahviste chrétien est bâti, et comme Horizon de son devenir humain à accomplir où l’homme sera un jour esprit pur, vivant la félicité avec Yahvé, ce Père que Jésus n’a jamais cessé de nous révéler. Dieu est notre Rocher, notre Voie et notre Horizon ici-bas avant d'être l'Arrivée que nous atteindrons par delà la chair et le sang, au-delà de ce monde. Ce mystère vécu de l’intérieur, un jour s’accomplira, et c’est en ce sens que le Christ nous parle du royaume de Dieu en nous et du royaume de Dieu aux cieux.

Le royaume de Dieu est participation double de l’esprit à la vie de la foi d’une part, comme praxis mentale intérieure, et de l’autre, en tant que projection active, comportementale de l’homme qui se sait fils de Dieu, relevant des principes divins malgré la poussière évanescente du temps et des étants de l’impermanence accablant le monde matériel. Le royaume de Dieu prêché par Jésus nous révèle Dieu comme le "Tout Autre" absolument Différent en même temps qu'Il est le "Grand Autre" pleinement Semblable et Père! Et il n’y a pas de mots épexégétiques ni aucune espèce d’exégèse théologique savante pour expliquer cette révélation qui évoque le mystère divin lui-même!

Le royaume de Dieu est l’empire de surabondance de la grâce Paraclétique qui vient des mérites rédempteurs du Christ Jésus, empire où l’homme assume la présence au monde selon la dimension d’esprit incarné pour vivre en son conscient et son subconscient le contact du Père. Là, l’homme de la conscience spirituelle, sait que le monde comme l’être au monde est vil voire néfaste sans la prégnance de l’esprit et sa vie avec le Père.

CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

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