Par Michel-Ange Momplaisir
À Camille Loty Malebranche sur La poésie et l'écriture
Cher et brave Loty,
En ce merveilleux matin de printemps, te voilà au pinacle de l'extase aléthique ! J'allais dire, comme Heidegger, l’extase de la vérité en tant que dévoilement de l'être, Unverborgenheit, l’alèthéia des Grecs.
Je crois que tu es l’hôte du Paraclet, comme naguère les pythagoriciens de leur Sainte Tétraktys. Comme tout vrai poète, tu te trouves aujourd’hui au sommet du délire SUPRARATIONNEL, un délire sélectif, enviable, à l’instar de celui d’un Jean de la Croix dans sa Vive flamme d’Amour.
« La première espèce de discours apophantique, c’est l’affirmation », proclame Aristote. L’affirmation de ce que la philosophie ne peut qu’esquisser. Contrairement à la poésie, il lui est difficile d’arriver jusqu’au bout. C’est pourquoi la philosophie ne peut s’achever que dans la poésie. Je rejoins Heidegger sur ce point. Déjà dans le Gorgias (482a), un dialogue réfutatif de sa jeunesse, Platon, par la bouche de Socrate, criait : « Oblige la philosophie à cesser de parler comme elle le fait ! » Dans sa Lettre sur l’humanisme Heidegger a eu aussi la même intuition : « Ainsi le langage sera le langage de l’Être comme les nuages sont les nuages du ciel. La pensée, de son dire, creusera dans le langage d’humbles sillons, des sillons de moindre apparence que ceux que le paysan trace d’un pas lent à travers la campagne. »
Vieux rat qui adore fouiner dans les bibliothèques, je suis sur cette terre beaucoup plus longtemps que toi. Et je n’ai jamais lu un texte aussi beau que profond comme LA POÉSIE ET L’ÉCRITURE. Je ne peux me permettre de retenir pour moi-même : « Camille Loty Malebranche est un Grand ! » Peu importe ce que lui même pense, et ce qu’on pense de lui.
Sans être prophète de quoi que ce soit, je fais une prédiction. En vertu du « pouvoir discrétionnaire » que me confère mon grand âge dans mon cas : « Tu arriveras loin, très loin, Camille, sur l’échiquier littéraire et philosophique de l’actuel monde ! »
Et, comme j’ai toutes les chances de te précéder dans la mort, selon ce vieux proverbe haïtien que je savoure, « les fourmis viendront me donner des nouvelles » de Camille Loty Malebranche ! Sache qu’elles le feront à coup sûr.
Courage ! Courage ! Continue dans la même foulée.
Michel-Ange Momplaisir